Six religieuses magogoises d’une même famille ont répondu à l’appel

La ville de Magog est au cœur de l’histoire de cette communauté religieuse bien connue dans la région de l’Estrie.

Cette communauté a été fondée en France en 1823 par Rose Giet. Elle avait été approchée à devenir religieuse par l’abbé Jean-Maurice Catroux, curé de la paroisse de LaSalle-de-Vihiers, située dans le diocèse d’Angers, afin qu’elle puisse former un groupement religieux pour offrir des services d’éducation et de charité dans la petite localité.

Vers le tournant du XIXe siècle, les gouvernements à la tête de la république française instaurent plusieurs lois qui ont pour effet d’empêcher les religieuses d’enseigner dans les écoles publiques, les taxent lourdement et les empêchent de porter leur habit religieux au nom de la laïcité des institutions publiques.

En 1904, devant ce contrôle incessant de la part du gouvernement civil, le supérieur ecclésiastique de la communauté, le chanoine Louis Marchand, entre en communication avec des évêques des États-Unis et du Canada.

En 1905, le supérieur de la Trappe d’Oka, Dom Antoine Oger, un moine cistercien d’origine française et ami du chanoine Marchand, entre en communication avec ce dernier pour lui faire part qu’un terrain est disponible aux abords du lac Memphrémagog et qu’il pourrait servir à l’édification d’un couvent dirigé par les Filles de la Charité. Le terrain est situé à Newport, au Vermont. Ce fut le premier endroit en Amérique où les religieuses sont débarquées pour continuer leurs œuvres d’enseignantes et d’hospitalières.

À L’ORIGINE DE LA PROVIDENCE

Le 1er octobre 1907, cinq religieuses débarquent Magog pour prendre la direction d’une petite crèche destinée à accueillir les enfants et les vieillards. Cette crèche est à l’origine de l’hôpital La Providence de Magog, devenu plus tard un établissement sous la gouverne du CIUSSS de l’Estrie – CHUS.

C’est à l’instigation de l’évêque de Sherbrooke, Mgr Paul LaRocque et du curé de la paroisse Saint-Patrice de Magog, l’abbé Charles-Édouard Milette, que les religieuses s’installent à Magog. L’évêque et le curé avaient constaté que la ville de Magog et le diocèse avaient grand besoin d’enseignantes et d’infirmières pour satisfaire aux besoins de la clientèle catholique qui augmentait de façon importante à la suite de l’ouverture des nombreuses manufactures de coton et de tissage.

En 1911, les Filles de la Charité ouvrent leur premier noviciat à Sherbrooke. Jusqu’à cette date, la composition de l’effectif des Filles de la Charité est presque exclusivement formée d’une cinquantaine de religieuses d’origine française.

PLUS DE 600 RELIGIEUSES

Suite à l’ouverture du noviciat, des centaines de nouvelles religieuses québécoises joignent les rangs de la congrégation. En 1960, l’effectif des Filles de la Charité se chiffre à plus de 600 religieuses, dont la plupart proviennent des localités avoisinantes.

Ainsi, les Filles de la Charité seront présentes dans un grand nombre d’écoles élémentaires et supérieures estriennes; à Magog, le Couvent Saint-Patrice (1909 – le centre communautaire actuel), le Couvent Sainte-Marguerite (1928) ainsi que les établissements scolaires Saint-Jean-Bosco (1951), Saint-Pie X (1955), l’école Brassard (1956) ainsi qu’à Omerville en 1954. Cette présence s’ajoute à l’hôpital magogois que les religieuses administreront jusque dans les années 1970.

À partir des années 1920, le rayonnement de la communauté des Filles de la Charité dépasse les frontières du diocèse de Sherbrooke. En effet, leurs services sont requis dans les régions de colonisation en Abitibi et en Afrique. Au même moment, on leur demande d’assumer des responsabilités dans des établissements situés dans les diocèses de Montréal, de Longueuil et de Nicolet.

Une proportion assez appréciable de Magogoises ont pris le voile et originent de plusieurs familles encore bien présentes sur le territoire, comme les familles Thomas, Bergeron, Gagné, Bourdeau, ou Sénécal.

LA FAMILLE CAMPAGNA

Parmi elles, la famille Campagna, dont les descendants sont encore bien présents à Magog.

En 1918, Antonio Campagna épouse la Magogoise Délia Audet à l’église Saint-Patrice de Magog; le jeune couple s’installe alors sur une terre non défrichée sur le chemin de Fitch Bay et située non loin de la famille Audet, près du chemin d’Ayer’s Cliff.

De cette union, 16 enfants sont nés, et parmi eux, 6 filles se sont engagées pour devenir Filles de la Charité. Fait très intéressant à noter, il s’agirait de l’une des familles ayant contribué le plus de filles d’une même famille au développement de la communauté religieuse (voir photo).

À une époque où on oublie trop souvent l’apport des communautés religieuses à la société québécoise, il ne faut jamais oublier ce que ces femmes ont apporté pour faire grandir notre monde. Il faut reconnaître la part de chacune dans notre bien-être et leur donner une place de choix dans notre mémoire collective.