Tribune libre: voir ma ville, vu autrement

Au risque d’en choquer un ou deux, imaginons ce qu’aurait pu être l’aspect de ma ville sous un autre format. Pour ce faire, revenons en arrière quelques décennies tout en adoptant pour un instant cette capacité de supprimer l’incrédulité, comme on le fait devant l’écran au cinéma.

C’était les bonnes années. L’autoroute 10, bien que payante, nous reliait à Montréal en temps record. Combiné avec l’autoroute 55 et la route 112, cette dernière formait un triangle qu’un urbaniste aurait mis à profit à coups de millions de dollars à Omerville. Le temps était aussi parfaitement opportun pour instaurer un plan de circulation pouvant maximiser l’accès à la rue Sherbrooke et supprimer ainsi le volume de circulation transitoire de la rue Principale.

Puis la ville connut des jours sombres avec la fermeture de plusieurs industries majeures. Mais, d’emblée, la vocation touristique prit un essor important qui, par le fait même, intensifiait l’importance d’une saine gestion de la circulation automobile vers les zones populaires. Avec la rue du Belvédère en place et la planification du Boulevard Larocque déjà terminée, il était possible d’organiser des parcours adéquats.

Mais ce qui était souhaitable et réalisable ne vit jamais le jour. Un intérêt trivial pour la rue Principale se développa et prit de l’envergure au point ou sa protection devenait prioritaire. Comme un culte nouveau qui exigeait des victimes, il devint nécessaire et justifiable de tout sacrifier pour assurer sa survie. Ainsi, le magasin grande surface fut planqué dans une zone humide et le relais routier fut établi ou n’existait aucun service d’aqueduc ou d’égout.  Et là où la logique aurait placé ces centres d’activités qui aurait non seulement séduit les passants en transit, mais aurait aussi aiguillé la circulation vers la rue Sherbrooke, on créa plutôt un terrain de soccer de 5 millions de dollars et un jeu d’eau d’un million de dollars, à proximité d’un autre terrain de jeux de 286 000 $ qui demeure pratiquement sans adeptes.

Vint ensuite la rénovation de la rue Principale pour 22 millions et plus. Le résultat final sera affreusement joli, mais quand le lustre de la nouveauté sera effacé, on réalisera que loin d’améliorer la situation du côté circulation, on a créé un véritable traquenard, qui augmentera la fréquence du blocus que l’on connaissait à l’intersection Merry en plus de restreindre le virage à gauche sur la rue des Pins. Avec l’étroitesse de la chaussée, une augmentation du nombre d’accidents de la circulation est à prévoir, en souhaitant que les résultats se limitent aux dégâts matériaux et non aux blessures corporelles. Reste à voir comment ce renouveau impactera la rentabilité des commerces de ce secteur?

Tant de projets qui nous laissent croupir. Et tant d’argent qui aurait pu être mieux utilisé. Et on nous en promet encore plus à la même saveur.  Il est temps de réaliser que les projets grandioses et dispendieux n’augmentent pas nécessairement la qualité de vie des contribuables. Il est temps d’envisager une nouvelle orientation, qui inclut l’évolution du secteur industriel, avec un changement critique à l’administration municipale.

 

 

Jules Lalancette

Contribuable de la ville de Magog