La «doyenne» du Vieux Clocher de Magog
CULTUREL. Malgré son tempérament discret, Suzanne Parenteau fait partie des visages les plus connus du Vieux Clocher de Magog. Pour y travailler depuis pratiquement trois décennies, elle a vécu au cœur de l’histoire qui a forgé ce lieu considéré comme une institution dans le milieu de l’humour et de la chanson.
Depuis quelques années, Suzanne Parenteau se fait un plaisir d’accueillir les clients. Installée derrière son comptoir, en bas de l’escalier, elle souhaite «bon spectacle» à ces visiteurs d’un soir, qui débarquent dans sa deuxième maison.
Car c’est vrai, son attachement pour cet endroit mythique est très fort. D’ailleurs, même si elle a réduit ses heures de travail en raison de son âge plus que vénérable, elle n’arrive pas encore à couper les ponts. «On peut dire que je suis en semi-retraite. Je ne me voyais pas partir du jour au lendemain et de perdre, du même coup, ce contact avec les gens. Je le vois comme une transition, mais je sais que tôt ou tard, il va falloir laisser ma place à ceux qui poussent derrière moi, ce qui est tout à fait normal», raconte-t-elle.
Tant de moments marquants
Chose certaine, le jour où elle tirera sa révérence, Mme Parenteau quittera l’esprit et le cœur remplis de souvenirs. Quand on lui demande ses moments marquants des 30 dernières années, elle pourrait en raconter pendant une journée, sans même faire le tour du jardin.
Mais à brûle-pourpoint, elle n’hésite pas à parler de ce soir où un problème s’est transformé en magie. «La chanteuse Eva donnait son spectacle lorsque l’électricité a manqué. On a mis des chandelles sur le piano pour qu’elle continue sa prestation. Et quand l’électricité est revenue, les spectateurs ont dit qu’ils n’en voulaient pas. Alors, on a passé le reste de la soirée dans le noir. L’ambiance était vraiment unique!»
Elle se souvient aussi de cette journée, lorsqu’elle s’est rendue dans la salle de spectacle au même moment où un certain Daniel Bélanger, dans sa jeune carrière, était seul sur scène pour le test de son. «Je montais les escaliers menant à la salle lorsque j’ai entendu les paroles «Six milliards de solitudes», se remémore-t-elle. La salle était complètement vide, tandis que lui en mettait comme si c’était plein. J’étais seule, à ce moment, et je me disais wow! Je ne l’oublierai jamais.»
Une proximité privilégiée
Pour avoir occupé différentes responsabilités au fil des années, Suzanne Parenteau a vécu une proximité privilégiée avec plusieurs artistes, particulièrement ceux de la vieille école. «Avant l’arrivée des cellulaires et des technologies, les contacts étaient plus rapprochés. Je pense à un Michel Barrette, par exemple, avec qui on a eu de longues discussions, autour d’une bière, après les spectacles. Aujourd’hui, c’est différent. Les artistes ont leur garde rapprochée et les échanges se font surtout avec ces intermédiaires. Ça n’enlève rien au fait qu’ils sont, pour la plupart, très gentils, mais le partage est différent qu’auparavant», constate la principale intéressée.
Il y aussi cette proximité avec le public, composé parfois de personnages colorés. Certains se permettent même d’intervenir en plein spectacle – un peu trop au goût des autres –, tandis que d’autres volent la vedette pour avoir un peu trop levé le coude. «Des gens déplaisants, il y en aura toujours malheureusement. Quand on mêle l’alcool, ça ne donne pas toujours de beaux résultats et parfois, il faut intervenir, soutient-elle. Même moi, je n’ai pas toujours été agréable envers ces gens-là. Oui, le service au client est primordial, mais quand on manque de respect, je ne me gêne plus pour leur faire savoir. Mais ces souvenirs moins beaux, disons qu’on essaie de les oublier.»
Chose certaine, la doyenne se dit très privilégiée d’être entourée de collègues aussi compétents et passionnés. À son avis, cette équipe «tissée serrée», menée par Bernard Caza, est au cœur du succès qui a permis au Vieux Clocher de traverser le temps et de demeurer une référence encore aujourd’hui.