Rainette faux-grillon et autres espèces en péril: la CMM protégera 22 % du territoire

MONTRÉAL — La Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) a adopté un nouveau règlement qui permettra de protéger 12 367 hectares de milieux naturels supplémentaires et l’entièreté de l’habitat de la  rainette faux-grillon de l’Ouest, une espèce menacée d’extinction qui joue un peu le rôle de «lanceuse d’alerte» pour d’autres espèces en péril.

Le nouveau règlement de contrôle intérimaire (RCI) interdira «toute construction, tout ouvrage, tous travaux ou toute activité dans les milieux terrestres et humides d’intérêt métropolitain ciblés par la CMM et dans l’habitat de la rainette faux-grillon», peut-on lire dans le communiqué de presse publié par la CMM jeudi matin. 

«Nos populations nous demandent de lutter contre les changements climatiques», et «j’ai envie de vous dire qu’on n’a pas le temps niaiser», a indiqué la mairesse de Montréal, Valérie Plante, en conférence de presse jeudi matin.

«Avec ce règlement, nous freinons la pression sur nos milieux naturels et protégeons les espèces en situations précaires les plus rares», a ajouté celle qui est également présidente de la CMM.

Ainsi, un total de 53 435 hectares, soit 22 % du territoire du Grand Montréal – une superficie équivalente à l’île de Montréal – feront maintenant l’objet de mesures de conservation, selon la CMM.

La rainette faux-grillon, une sorte de canari dans la mine

Si la rainette faux-grillon fait les manchettes depuis des décennies et si elle est si importante aux yeux des biologistes, c’est qu’elle est une sorte de canari dans la mine des milieux humides, selon l’Association des biologistes du Québec.

«Elle est un peu emblématique des milieux humides car elle a besoin de milieux humides très particuliers, elle est donc comme une lanceuse d’alerte qui nous dit qu’on est en train de perdre nos écosystèmes de milieux humides», a indiqué Chantal d’Auteuil, directrice générale de l’Association des biologistes du Québec, en précisant que lorsqu’on la protège, on protège d’autres espèces menacées.

«Enfin quelqu’un prend les devants, c’est un très bon début», a indiqué la biologiste à propos de l’annonce de la CMM.

En réduisant les pressions liées à l’urbanisation dans certains milieux humides, le nouveau règlement permettra notamment de protéger les habitats de diverses espèces menacées comme le petit blongios, un oiseau aquatique, le ginseng à cinq folioles, des types de fleurs, de plantes et d’alvars. 

Pour optimiser la protection des écosystèmes, il est préférable que les milieux naturels soient reliés entre eux par des «corridors écologiques» ou des «corridors verts» plutôt que d’être isolés les uns des autres, afin de favoriser le déplacement des espèces.

Anne Keough, biologiste à la Communauté métropolitaine de Montréal, a indiqué qu’environ 80 % des 53 000 hectares qui feront l’objet de conservation «sont des bois et corridors forestiers», qui permettent donc la continuité des corridors écologiques.

Une annonce qui n’a rien à voir avec les agissements du CN

Mercredi, le quotidien La Presse nous apprenait que leCanadien National (CN) avait détruit sans autorisation un milieu humide à Longueuil, qui abritait l’un des derniers habitats de la rainette faux-grillon.

Mais l’annonce du nouveau règlement concernant les milieux naturels n’a rien à voir avec cet incident.

«C’est un malheureux hasard», a indiqué la mairesse de Longueuil, Catherine Fournier, en précisant que c’est en août 2021 que le CN a remblayé une partie de l’habitat de la rainette faux-grillon au marais Darveau et que c’est en réalisant l’inventaire du batracien il y a quelques semaines que des organismes environnementaux ont constaté la destruction d’un milieu humide, comme l’a rapporté La Presse.

Malheureusement, le nouveau règlement ne permettra pas de s’assurer qu’un tel événement ne se reproduise, a indiqué la mairesse, en raison du statut de cette entreprise qui est de juridiction fédérale.

Une campagne de communication

Lors du point de presse, le directeur général de la CMM, Massimo Iezzoni, a indiqué qu’il ne craignait pas que la protection éventuelle de 22 % du territoire du Grand Montréal puisse effrayer certains promoteurs.

«Ce que les promoteurs demandent, c’est de la prévisibilité, alors aujourd’hui on transmet un règlement de contrôle intérimaire, mais la prochaine étape, on va devoir avoir une campagne de promotion pour aviser tous nos partenaires et nos  promoteurs qu’il y a maintenant, à l’échelle métropolitaine, un élément de protection qui s’applique au niveau des municipalités», a précisé M. Iezzoni.

Une cartographie interactive de l’ensemble des milieux protégés sera bientôt publiée et le nouveau règlement devrait entrer en vigueur dès son approbation par la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, dans un délai maximal de 60 jours.