Des candidates aux élections à l’Î.-P.-É. ont vécu du cyberharcèlement

L’ampleur du harcèlement en ligne ciblant les femmes et les personnes non binaires qui se présentent aux élections est une tendance inquiétante qui pourrait les dissuader de se lancer en politique, soutient la Coalition pour les femmes en politique de l’Île-du-Prince-Édouard.

Un rapport de la coalition militant pour davantage de femmes en politique a constaté que les deux tiers des personnes s’identifiant comme des femmes, ou issues de la diversité de genre, et qui étaient candidates aux dernières élections provinciales ont été confrontées à une forme de harcèlement en ligne.

Kari Kruse, gestionnaire de projet au sein de l’organisation, a souligné que les femmes et les personnes non binaires qui se sont présentées aux élections ou qui ont manifesté leur intérêt pour de futures campagnes sont troublées par le harcèlement en ligne souvent misogyne dont elles sont victimes ou dont elles sont témoins.

«Les personnes disent qu’elles ne se sentent pas préparées à y faire face, elles craignent d’être victimes de harcèlement en ligne», a-t-elle ajouté. «Ça a certainement un impact et ça peut réduire la participation politique.»

L’enquête et la série d’entrevues menées auprès de 15 femmes et personnes issues de la diversité de genre qui ont participé aux élections de 2023 ont révélé qu’au cours de leur campagne, une majorité d’entre elles avaient été victimes de ce que les auteurs appellent «la violence facilitée par la technologie». Les auteurs de l’étude avaient sollicité l’avis de 53 personnes s’identifiant comme des femmes ou issues de la diversité de genre qui étaient inscrites pour se présenter aux élections de 2023.

Le rapport révèle des tendances dans le type de harcèlement en ligne auquel elles ont été confrontées, comme des injures et même des menaces de violence physique. Une candidate a déclaré avoir reçu une menace anonyme sur les réseaux sociaux disant: «Si vous gagnez votre siège, vous le regretterez!»

Une autre candidate a indiqué qu’on lui avait dit de «penser à se concentrer sur sa famille» au lieu de se présenter aux élections.

Une personne interrogée lors de l’enquête a déclaré: «J’ai été menacée. Un homme a dû trouver mon courriel personnel, je ne sais pas comment. Il m’a envoyé des menaces de violence physique à peine voilées, avec beaucoup d’injures. J’ai déterminé de quelle circonscription il venait, nous avons donc évité sa maison et le quartier. On m’a dit d’appeler peut-être la Gendarmerie royale du Canada [GRC], mais rien de plus.»

Une personne candidate a affirmé avoir vécu du harcèlement sur les réseaux sociaux par une institution religieuse de l’extérieur de la province avec laquelle elle n’avait jamais eu de lien. Cette institution déplorait que la personne se soit présentée comme candidate d’un parti qui soutenait l’accès à l’avortement.

Kari Kruse affirme que cette enquête constitue un point de départ important pour analyser l’impact du harcèlement sexiste en ligne en tant qu’obstacle à la participation politique. «L’impact très réel est que nous aurons une démocratie moins représentative. Si les femmes et les personnes de diverses identités de genre ne se sentent pas capables de faire le travail d’un politicien parce qu’elles craignent pour leur sécurité, c’est un réel problème», a-t-elle ajouté.

En 2023, 20 hommes et sept femmes ont été élus à l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard.

La coalition a utilisé les résultats de son enquête pour élaborer une politique sur la manière dont les partis politiques peuvent soutenir les personnes candidates, notamment en sensibilisant la population aux diverses formes de violence facilitée par la technologie, comme le harcèlement au téléphone et sur les réseaux sociaux, les forums, les balados et les blogues. Ce type de violence inclut également l’utilisation de logiciels de piratage et de suivi.

La politique de l’organisation offre aussi des lignes directrices pour recenser les incidents de harcèlement et soutenir les victimes, ainsi qu’un code de conduite uniformisé pour répondre aux cas de harcèlement.

Kari Kruse a affirmé que la politique a été bien accueillie par les partis progressiste-conservateur, libéral, néo-démocrate et vert de la province.