TRIBUNE LIBRE: Ex-Difco de Magog : une évaluation très basse et très bizarre

Au mois de septembre 2019, le Collectif du Quartier-des-Tisserands a remporté une première victoire qui n’a guère été publicisée : de 200 $, l’évaluation foncière de l’ancienne filature de la compagnie Difco a monté à 93 000 $.

La Ville de Magog ne s’en est pas vanté alors que c’est elle qui en est bénéficiaire, plus précisément l’ensemble des payeurs de taxes.

Cette hausse s’est produite de façon bizarre. Non seulement à cause du montant de la hausse, mais aussi en raison de la manière dont elle s’est produite.

Il faut se rappeler qu’à la fin du mois d’avril 2019, un membre de notre Collectif a contesté l’évaluation foncière de cet immeuble, évaluation qui avait baissé à presque 0 $ peu de temps après la fermeture de 2011. Deux choses très claires ont été demandées :

1) que l’évaluation dérisoire de 200 $ de l’exDifco soit reportée à 2 millions de dollars, soit approximativement le montant de l’évaluation au moment de la fermeture de l’usine en 2011;

2) que, par la même occasion, le lot vacant en face de l’ancienne usine soit détaché du 160, rue Principale Est et soit évalué au même niveau que les lots voisins du quartier des Tisserands, soit à environ 50-55 $ du mètre carré.

Le 28 août 2019, six mois plus tard et à la limite du délai permis par la loi pour répondre à une contestation, l’évaluateur Jean-Pierre Cadrin a statué que son évaluation était en tout point conforme à la Loi sur la fiscalité municipale et qu’il n’y changeait rien.

Notre Collectif n’était pas du tout satisfait de cette réponse et une rencontre avec la mairesse a été demandée pour en discuter. Lors de cette rencontre du 3 octobre 2019, on nous a appris qu’il y aurait une révision de l’évaluation.

Le 8 octobre, une lettre de la Ville confirmait que l’évaluateur Cadrin avait soudain porté l’évaluation à 93 000 $ le 10 septembre 2019, soit 13 jours après avoir répondu qu’il n’en ferait rien. Que s’est-il passé pendant ces 13 jours pour qu’apparaisse ce virage à 180 degrés?

La Ville écrit : « La correction a été faite à l’initiative de l’évaluateur, d’un commun accord avec la ville… ». Une telle affirmation est tout aussi surprenante que la subite révision de l’évaluation, car selon la loi, l’évaluateur doit être tout à fait indépendant de la ville. Que signifient alors les mots « d’un commun accord avec la Ville »? Est-ce à dire que la baisse de l’évaluation, peu après la fermeture de l’usine en 2011, aurait aussi pu se faire « d’un commun accord avec la Ville », ce qui est pourtant interdit par la loi ?

Quoi qu’il en soit, grâce à l’action du Collectif, la Ville a encaissé pour l’année 2019, 1 955 $ en taxes foncières plutôt que 1,52 $ auparavant. Ce fut un premier pas dans la bonne direction. Si cette évaluation encore beaucoup trop basse avait prévalu depuis 2012, c’est tout de même plus de 17 500 $ que le trésor public aurait encaissé chaque année plutôt que la dérisoire somme de 13 $.

Pour rester dans les chiffres, si selon la réévaluation à 93 000 $ de septembre 2019 rapporte 1 955 $ de taxes à la ville, on peut estimer que chaque tranche d’évaluation de 100 000 $ aurait rapporté plus ou moins 2 000 $ par année au budget municipal. De 2012 à 2020, une évaluation à 100 000 $ aurait alors rapporté 18 000 $ en taxes. Si l’évaluation était restée à 2 millions $, c’est-à-dire 20 X 100 000 $, c’est 20 fois 18 000 $ que la Ville aurait perçu en taxes pendant ces neuf ans, soit 360 000 $, alors qu’elle n’a reçu qu’un maigre 13 $.

Pendant toutes ces années, le propriétaire Anahid Hospitality Management inc. a laissé à l’abandon les bâtiments de l’ancienne filature, sans chauffage, sans électricité, sans eau. « Un véritable danger public » tel que déclaré publiquement en février 2019, des représentants de la Régie de police de Memphrémagog et du Service de sécurité incendie de la Ville de Magog.

Autre point que le Collectif a appris : en plus de n’avoir payé que d’infimes taxes depuis 2012, Anahid Hospitality Management inc. a encaissé 24 000 $ par année depuis le 1er janvier 2016, soit un total de 120 000 $ à la fin de la présente année, sans aucun permis et sans aucune dépense d’entretien, pour la location de son vaste stationnement au CIUSSS de l’Estrie.

Qui paye, finalement, pour les travaux de mise en valeur de l’ancienne filature qu’a entrepris Anahid Hospitality Management inc. au mois de septembre dernier?

Ceci n’est qu’une partie de ce que le Collectif découvre peu à peu depuis l’automne 2018 à la suite d’une centaine de demandes d’accès à l’information auprès de la Ville de Magog.

Ce mardi 8 décembre prochain, la Ville tiendra une séance virtuelle d’information sur les travaux dans une partie du site de l’ancienne usine de la DIFCO : https://www.ville.magog.qc.ca/wp-content/uploads/2020/11/Communique-Seance-information-travaux-difco-Magog.pdf

Le Collectif du Quartier-des-Tisserands de Magog