Le bonheur
Être heureux dans la vie, c’est la somme des petits bonheurs. Marcel Achard écrivait que «le bonheur, c’est la somme de tous les malheurs qu’on a pas». C’est prétentieux d’écrire une réflexion, un texte sur le bonheur. Je ne suis pas expert en relation humaine, je ne suis pas psychologue, ni curé, ni thérapeute. J’ai tout simplement du vécu.
Que tu aies une propriété de quatre millions de dollars ou une propriété de 200 000 dollars, cela n’a rien à voir avec le bonheur. C’est dans la maison que se trouvent souvent les petits bonheurs: la famille. Cependant avec les petits bonheurs, il y a aussi le contraire, soit des peines, de la tristesse et de la déception, mais la somme des ces contraires s’effacent dès l’arrivée d’un petit bonheur. C’est ce qui fait qu’on tient à la vie pendant toute une vie. Je sais, me direz-vous, chez certains, la famille n’est pas toujours une source de petits bonheurs. Voilà, je reconnais n’avoir pas la vérité, mais je réfléchis.
Cette semaine au Métro, j’ai vécu un petit bonheur en écoutant un ami me conter un de ses petits bonheurs. Son couple a adopté un bébé qui, aujourd’hui, est une belle adolescente. Or aux fêtes, elle a offert à ses parents un cadeau d’environ 10 $ qui valait à leurs yeux plusieurs millions de dollars. Elle leur a fait une vidéo, un film de sa vie. Un film qui commençait par son adoption dans un pays oriental et qui se terminait par son entrée à l’école de cinéma et communication. Elle avait monté sa vidéo comme un vrai film avec un début comme la tête du lion qu’on voit dans un film hollywoodien, une bande sonore et un générique à la fin. Elle venait de dire merci à sa mère et son père de l’avoir adoptée et de l’aimer.
C’était la première fois que je voyais dans les yeux du père ce petit bonheur qui fait de nous des gens heureux. Ce qu’il ne savait pas, c’est qu’il venait aussi de me faire vivre un petit bonheur.
J’écris ce texte pendant l’émission de La Voix où un père vient de chanter et aucun des juges ne s’est retourné. À l’arrière-scène, ses trois jeunes enfants sont là et ils ont les larmes aux yeux de voir qu’aucun des juges ne s’est retourné pour leur père. Le petit bonheur venait de passer outre. Mais à l’arrivée de leur père, ils se sont serrés dans leurs bras et le petit bonheur était de retour.
Le bonheur, ça se passe à l’intérieur de nous, pas ailleurs. C’est un art que d’être heureux. J’ai connu dans ma pratique du droit des gens qui sont allergiques au bonheur. Dès que tout va bien, dès qu’ils ont un moment de bonheur, au lieu de ressentir une paix intérieure, ils se demandent qu’est-ce qui va bien leur tomber sur la tête. Ils cherchent le pourquoi du pourquoi.
Jacqueline Dulac chantait qu’«on devrait mourir lorsqu’on est heureux». La mort, ce serait alors un orgasme continu et éternel. Rien n’est plus absurde que de naître pour mourir, disait Jean Paul Sartre. Si nous n’étions pas nés, nous n’aurions pas à mourir, mais comme nous sommes nés, nous devons mourir. Entre les deux pôles, nous nous devons d’avoir plus de petits bonheurs.
Je vous laisse sur cette réflexion d’Albert Camus qui disait «que le bonheur, c’est de courir après sachant que l’on ne l’aura jamais», ce qui veut dire, en d’autres mots, qu’il ne faut jamais lâcher de vivre nos petits bonheurs.
Me Laurent Pelletier, avocat à la retraite
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