Yvon Bélair, l’homme aux mille causes

PERSONNALITÉ. Yvon Bélair n’a plus besoin de présentation. Au fil des années, plusieurs l’ont côtoyé dans divers organismes, notamment à titre de Grand Chevalier, tandis que d’autres l’ont croisé à un moment plus difficile de leur vie. Bénévole engagé, Yvon est toujours là où on a besoin de lui.

La dernière année est en un bel exemple alors qu’Yvon Bélair s’est retrouvé au cœur d’importantes campagnes de financement. Confrontés à la maladie, Sébastien Jacques, Line Nantel et Josée Maillé ont tous bénéficié d’un support inespéré de la communauté. Plus de 100 000 $ ont été amassés.

Une générosité extraordinaire qui va bien au-delà du don en soi, puisque derrière ces grandes levées de fonds se cache énormément de travail accompli par des gens de cœur, comme Yvon, qui s’oublient en pensant aux autres. Pour ces travailleurs dans l’ombre, il est difficile d’accepter autant de crédit et encore moins d’être nommé personnalité de l’année.

«Je n’ai jamais cherché de visibilité et de voir ma face dans le journal. Je le fais, car ça vient avec mes responsabilités. C’est bien beau de parler d’Yvon Bélair, mais il y a une équipe derrière moi, des gens exceptionnels et dévoués qui donnent beaucoup de leur temps. Ces gens méritent autant d’attention, car un Yvon Bélair tout seul, ça ne donnerait pas grand-chose», relativise le jeune retraité de 67 ans, en toute humilité.

Une histoire de famille

L’engagement communautaire est une histoire de longue date pour celui qui est père de trois enfants et grand-papa huit fois. Né d’une famille aisée de sept enfants, il a rapidement été confronté à la réalité de la vie, où la pauvreté n’était pas un secret. «Les samedis soirs, mon père allait chez Atlantic and Pacific au centre-ville, pour acheter les fruits et légumes qui restaient avant la fermeture de l’épicerie, qui était fermée le dimanche. On allait ensuite les donner à des plus démunis. J’avais peut-être 13 ou 14 ans et ça m’a marqué.»

Il se souvient aussi d’avoir été initié très jeune au travail, notamment à la ferme de sa cousine à Saint-Adrien, où il a accompli des tâches normalement réservées aux adultes. «Aujourd’hui, on s’indignerait de faire travailler des enfants de la sorte, mais à l’époque, ça marchait ainsi et j’aimais bien ça!»

Visiblement, il a pris goût au travail manuel alors que quelques années plus tard, il a suivi les traces entrepreneuriales de son père et de son grand-père en fondant Peinture Orford. Il y a fait carrière durant 38 ans aux côtés de sa complice de tous les jours, Diane Roy, qui est encore en service aujourd’hui, à titre de secrétaire, alors que son fils Sébastien tient les rênes de l’entreprise. «Je travaillais 40 heures la semaine, les vendredis soir et le week-end, je rencontrais des clients et je faisais du bénévolat à travers. Ça en faisait beaucoup, même trop parfois. J’ai failli tout lâcher et changer de carrière pour un poste en maintenance. On était deux en entrevue, mais quand j’ai su que l’autre personne était un jeune père de famille, je leur ai dit de le prendre. Il en avait plus besoin que moi.»

Un saut en politique

Cet horaire bien chargé ne l’a pas empêché de tenter sa chance en politique à quatre reprises: deux fois au provincial pour le Parti québécois (1981 et 2013), une autre pour le Parti nationaliste au fédéral (1984) et une dernière à la Ville de Magog à titre de conseiller.

Son franc parlé, parfois trop au goût de certains admet-il, et son profond désir de servir la population n’ont pas suffi pour goûter à la victoire. Il en garde malgré tout de bons souvenirs. «Je voulais me présenter pour faire changer des choses, comme le plein emploi. Encore aujourd’hui, on donne des chèques d’aide sociale sans rien recevoir en retour. Certains prestataires travaillent même au noir. La société serait beaucoup plus gagnante à les faire travailler pour avoir leur chèque. Il faut que l’on redonne à ces gens la fierté de mériter ce qu’ils gagnent», croit-il, en précisant que son intérêt pour la politique active est bel et bien derrière lui.

Faire confiance à son intuition

Durant toutes ces années, Yvon Bélair en a vu de toutes les couleurs et est passé par toutes les gammes d’émotions. Pour lui, la misère humaine a des noms, des visages, des voix et certaines histoires, soutient-il, sont d’une tristesse infinie.

Heureusement, il y a aussi le beau côté de la médaille, «celui qui permet de recharger les batteries», lorsque les regards scintillent, les sourires s’affichent et le bonheur resplendit. Bref, lorsqu’on a l’impression d’avoir fait une différence, si minime soit-elle.

«Dans la vie, j’ai appris à suivre mon intuition. Pour moi, il n’y a pas de hasard. Tout arrive pour une raison. Je me souviendrai toujours de ce monsieur qu’on a aidé quelques jours avant Noël. Il venait de sortir de l’hôpital, son appartement était vide. Quand je l’ai vu, son véhicule venait même de briser. Ça n’allait vraiment pas bien. Finalement, on a tout meublé et rempli son frigidaire. Il nous a confié qu’il avait dit à son père de venir chercher son fusil, car ça faisait trois fois qu’il le chargeait. D’après moi, si on n’était pas allé le voir ce soir-là, c’était fini.»

Tant et aussi longtemps que la santé lui permettra, Yvon Bélair entend continuer à aider les plus démunis autour de lui. «Si quelqu’un a besoin d’aide, je vais être là», répète-t-il sans hésiter. Comme tout philanthrope, il rêve d’un monde meilleur, sans pauvreté, ni souffrance. Il souhaite aussi plus d’engagement de la part de ceux qui ont les capacités de le faire. «Penser à nous autres, c’est correct, mais penser aux autres, c’est tellement plus valorisant. Tout le monde a son horaire, ses responsabilités et ses loisirs, mais de temps en temps, c’est important aussi de donner un petit coup de main à son voisin. C’est ensemble qu’on peut réussir à faire une différence», conclut-il