Un commerce itinérant fait jaser à Magog

AFFAIRES. L’arrivée d’un magasin de meubles à Magog, au cours des dernières semaines, a soulevé bien des interrogations dans l’esprit de clients, de la Ville de Magog, de la police et d’organismes de protection du consommateur.

Nature et Vie loge au 189, rue Tupper. On y accueille des clients préalablement sollicités par téléphone. On les attire avec des cadeaux et des rabais alléchants, à condition de prendre rendez-vous en couple dans un délai de quelques jours. Rien d’illégal, mais les techniques de vente sont considérées à forte pression.

Un couple magogois, qui préfère taire son identité, dénonce ce stratagème pour éviter que d’autres «tombent dans le panneau». Il informe que les meubles sont en apparence de haut de gamme et à fort prix pour offrir de gros rabais. «On a failli tomber dans le piège, mais on a décidé de prendre une nuit pour réfléchir avant de décliner l’offre, raconte l’homme de Magog. Il faut être prudent, car nous sommes toujours vulnérables, plus particulièrement avec des aubaines.»

Encore sous le couvert de l’anonymat, un autre Magogois peste contre l’intense sollicitation téléphonique. Il dit avoir reçu dix appels en deux semaines pour lui offrir des cadeaux qui ne l’intéressent pas. «J’ai même eu des appels il y a six mois, dit-il. Ça s’est calmé avant de reprendre de plus belle dernièrement. La moitié de la ville doit avoir été sollicitée par téléphone.»

Le directeur général de la Régie de police Memphrémagog (RPM), Guy Roy, a lui aussi reçu un appel similaire pour aller acheter des meubles. Il n’en a pas fait de cas, mais quelques plaintes concernant les agissements de ce magasin de meubles ont été acheminées à la RPM. «Il n’y a rien de criminel, mais nous suggérons d’être très prudents avant d’encourager ce type de commerce», recommande-t-il.

Un usage interdit, selon la Ville

À la Ville de Magog, on surveille le dossier très attentivement en raison d’un usage non permis dans cette zone. La conseillère municipale Nathalie Pelletier spécifie que la vente de meubles est interdite à cet endroit. «La Ville prend les moyens pour régler ce dossier le plus rapidement possible», assure-t-elle.

Jeudi, la Ville de Magog informait la population que le commerce allait plier bagage ce vendredi 31 janvier.

L’Association coopérative d’économie familiale de l’Estrie (ACEF) invite également à la prudence. La coordonnatrice de cet organisme, Sylvie Bonin, compare les activités de la rue Tupper aux pratiques de deux autres commerces similaires à Windsor et à Sherbrooke, l’an dernier.

Mme Bonin voit un scénario similaire qui se répète. Selon elle, il y a aura encore des consommateurs qui regretteront d’avoir signé sous pression un contrat pour des meubles à coût élevé. «D’autres seront insatisfaits des meubles reçus, s’attriste-t-elle. Soyez vigilants, car ces gens quitteront dès qu’ils auront assez vendu ou qu’ils sentiront la soupe chaude. Ils changeront de nom et de ville.»

L’ACEF recommande de ne jamais signer de contrat le jour même, de toujours prendre le temps d’évaluer si le produit correspond vraiment à vos besoins et de comparer les prix avec des commerçants de la région.

Dans certains cas, il est possible d’annuler un contrat de vente dans un délai de 10 jours, voire d’un an selon le cas. Info auprès de l’ACEF (819 563-8144) ou auprès de l’Office de protection du consommateur (819 820-3694).

Des plaintes qui s’additionnent

L’Office de la protection du consommateur signale que cette entreprise de la rue Tupper ne possède aucun permis de vente itinérante. Il confirme la réception de deux mises en demeure à propos de ce commerçant (9366-0363 Québec Inc.) œuvrant depuis quelques mois sous le nom d’Euro-Confort ainsi que de Nature et Vie. Ces plaintes de décembre et de novembre 2019 touchaient la pratique trompeuse ou déloyale, ainsi qu’une livraison non conforme.

Depuis septembre 2019, l’Office a reçu 27 plaintes concernant les pratiques de ces deux entreprises, dont la majorité pour pratique trompeuse et déloyale. «Quelques-unes de ces plaintes découlent du commerçant magogois», détaille le porte-parole de l’Office, Charles Tanguay.

En décembre 2018, l’Office recommandait déjà la méfiance face à certains commerçants de meubles. «Ils invitent les consommateurs à des séances de vente dans des locaux  temporaires, au cours desquelles toutes les techniques semblent être bonnes pour obtenir une signature», expliquait-on par voie de communiqué.

L’Office prévient également les consommateurs de faire attention aux cadeaux et rabais extraordinaires, aux prix gonflés pour favoriser la négociation, en plus de se donner un délai de réflexion.

On n’avait pu obtenir la version des faits du commerçant de la rue Tupper au moment d’écrire ces lignes. Des appels téléphoniques sont restés sans réponse. Des visites du représentant du Reflet du Lac se sont butées à des portes closes.