Quand des bouteilles de vin survivent à une explosion

EXPLOSION. Un an après l’explosion qui a complètement détruit le Centre de valorisation de l’aliment (CVA) de Sherbrooke, le vignoble du Domaine Bergeville dévoile l’histoire derrière sa nouvelle cuvée de vins mousseux baptisée les Invincibles, qui sont en fait les derniers vestiges de ce drame survenu le 23 mars 2022. 

Le vignoble situé au Canton de Hatley utilisait les locaux du CVA pour y entreposer ses meilleures cuvées en méthode traditionnelle. Le jour de l’explosion, ce sont 8000 bouteilles qui se trouvaient à l’intérieur du vaste bâtiment du boulevard Bourque.

En raison de l’intensité de l’explosion et de l’ampleur des dégâts, il est difficile d’imaginer que ces vins mousseux aient pu sortir pratiquement indemnes des décombres. C’est pourtant le petit miracle qui s’est produit, grâce à la détermination et l’acharnement du Domaine Bergeville.

«Au départ, la CNESST ne voulait d’aucune façon que nous accédions au site pour des raisons de sécurité, raconte la vigneronne Eve Rainville. Les bouteilles se trouvaient sous la partie du bâtiment qui était encore debout, mais sous un toit très chambranlant. Il nous a fallu plus d’un mois et demi de démarche pour réussir à convaincre un ingénieur de signer un plan d’évacuation, ce qui nous a permis finalement d’aller à la rescousse de nos rescapés. »

Pas question d’abandonner «leurs enfants»

Malgré tout le temps et l’argent investi dans cette opération de sauvetage, le Domaine Bergeville n’avait aucune garantie de son succès. Mais dans la tête de ses responsables, il était inconcevable d’abandonner ces deux millésimes à leur sort en sachant tout le travail qui se cache derrière chacune d’elles. « Pour nous, chaque bouteille de vin, c’est comme notre enfant. On ne pouvait pas les laisser sous un toit chambranlant, à la merci de la température, sans essayer de tout faire pour les sauver. D’autant plus qu’un vin, ce n’est pas quelque chose qui se fait sur demande. Les raisins, on les récolte une fois par année. Donc, tout ce qu’on perd, c’est impossible de le reproduire.»

Un résultat unique

Heureusement, la délicate procédure a permis de sauver environ 90% de la production sinistrée, c’est-à-dire 7000 bouteilles. Malgré l’accomplissement, l’heure n’était pas encore aux réjouissances puisqu’il fallait maintenant vérifier si les vins seraient propres à la consommation. Avec l’aide du laboratoire d’Oenoscience et un suivi rigoureux pendant onze mois, le vignoble a été en mesure d’écarter tout risque de goût de fumée pour le présent et pour le futur.

De plus, aucun défaut majeur n’a été détecté dans le produit. «Au niveau aromatique, il n’y a pas vraiment de différence si on compare une bouteille qui était au CVA et une qui ne l’était pas. Mais c’est sûr que le vin de l’explosion a subi un trauma. On sent qu’il a un choc et qu’il est fragilisé. Mais comme amateur de vin, on peut accepter que cette bouteille ait son histoire ainsi que son parcours, et l’accepter pour ce qu’elle est», conclut Eve Rainville.

Pour en savoir davantage sur l’histoire des Invincibles, il suffit de consulter le domainebergeville.ca/les-invincibles/