L’Estrie en tête de peloton pour la conversion des lieux de cultes
Depuis une décennie, pas moins de 285 églises du Québec ont changé de vocation ou sur le point de l’être, révèlent des données obtenues par TC Media. L’Estrie figure d’ailleurs en tête du peloton au Québec avec 30 églises fermées, transformées ou en cours de transformation.
La majorité de ces églises ont été converties sur la scène provinciale. Elles ont été mutées en centres communautaires, en bibliothèques, en salles de spectacle ou même en immeubles à logements abordables, d’après une compilation scrupuleuse du Conseil du patrimoine religieux du Québec (CPRQ), un organisme à but non lucratif qui veille à la conservation et la mise en valeur des biens et des immeubles de l’Église.
L’Estrie occupe le troisième rang provincial avec 30 conversions, tout juste derrière Montréal (58) et la Montérégie (47). Quelques exemples sont d’ailleurs illustrés dans le reportage de la page 5, incluant le Vieux Clocher de Magog et la Bibliothèque Memphrémagog.
La région se démarque également sur le nombre d’églises ayant conservé leur vocation depuis dix ans avec 194. Encore ici, l’Estrie occupe la troisième position québécoise derrière Montréal et la Montérégie.
D’après la professeure titulaire à la Faculté de théologie et des sciences de la religion à l’Université de Montréal et la titulaire de la Chaire religion, culture et société, Solange Lefebvre, le Québec est en avance sur plusieurs pays, notamment européens, lorsqu’il est question de trouver un nouvel usage aux églises. «On est plus avancé dans la mesure où on en déjà converti, a-t-elle dit. On a assumé déjà le fait qu’il fallait convertir ces églises».
Mme Lefebvre a notamment souligné la création de la Fondation du patrimoine religieux du Québec, en 1995, qui est devenue en 2007 le CPRQ, ainsi que le rapport de la Commission de la culture déposé en 2006, Croire au patrimoine religieux du Québec.
Le gouvernement du Québec a en plus consacré près de 275 M $ dans la restauration du patrimoine religieux depuis 1995.
Bien que le Québec ait fait un pas de plus dans la transformation des églises, il est encore trop souvent en mode réaction, a déploré l’architecte Ron Rayside, qui a participé à plusieurs conversions d’églises. «Il faudrait que l’archevêché, les églises, la Ville et peut-être même le gouvernement du Québec s’assoient ensemble pour voir quel sera le plan pour les 20 prochaines années. Il faut qu’on aille une grande réflexion et surtout le temps de la faire», a-t-il fait savoir
En 2006, la Commission de la culture a exhorté le gouvernement du Québec à décréter un moratoire «sur l’aliénation et la modification des bâtiments religieux» afin de prendre le temps de réfléchir à l’avenir des églises. Le ministre de la Culture d’alors, Line Beauchamp, avait refusé en disant que le moratoire serait «un processus lourd et intrusif qui va à l’encontre du droit de propriété».
Ron Rayside regrette que trop souvent, les communautés cherchent à la va-vite un nouvel usage à leur église. Lorsque celles-ci sont fermées, elles se détériorent rapidement, faute d’entretien. Et le temps que les communautés sinon les promoteurs trouvent un projet réalisable et le financement nécessaire, la dégradation s’accélère.