Femme d’affaires… et de coeur

PERSONNALITÉ. L’instinct de survie, la passion du métier et une dose d’insouciance, voilà trois caractéristiques qui ont accompagné Dorothée Garant au cours des 25 dernières années et qui lui permettent aujourd’hui de mener de front deux carrières associées à la médecine: la première comme omnipraticienne à l’urgence, et la seconde à titre de propriétaire d’une clinique médico-esthétique.

À première vue, Dorothée Garant est le genre de personne à qui tout semble réussir. Et pourtant, l’omnipraticienne magogoise en a bavé un coup pour réussir ses études en médecine. Changement de spécialité après trois ans (de l’ophtalmologie à la médecine d’urgence), climat de travail difficile et naissance de ses deux enfants, voilà quelques événements qui ont ponctué un parcours beaucoup plus long que prévu. «Ça m’a pris 11 ans pour compléter ma médecine. Ce fut particulièrement chargé lorsque Mathieu est arrivé (en 1995). Pas question d’aller à des partys, comme les autres. J’étudiais et je m’occupais de mon bébé. J’allaitais même entre les cours», se remémore-t-elle.

Insatisfaite des conditions dans lesquelles les mères étudiantes se retrouvaient, elle crée un comité bien-être des résidents à la Faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke.  Son implication lui vaudra le Prix du leadership canadien à sa sortie de résidence, quelques années plus tard. «J’étais très fière de ce prix. Et j’étais également fière de réussir à m’impliquer dans une cause, malgré mes études et mon rôle de mère. Tout ce que je regrette de cette période, c’est que je manquais de temps pour m’entraîner», souligne-t-elle.

Car l’entraînement, faut-il le préciser, a toujours fait partie intégrante de la vie du Docteur Garant. Spécialiste des sports d’endurance, elle faisait même partie de l’équipe nationale junior d’athlétisme et avait des visées sur les Jeux olympiques, avant qu’elle ne soit stoppée par un AVC, à l’aube de la vingtaine.

«C’est arrivé durant un 1500 mètres. Les médecins pensaient que c’était peut-être en lien avec l’entraînement, alors j’ai dû tout arrêter. Pour effacer ma déception, je suis partie vivre un an à Hawaï et je me suis trouvée un boulot là-bas. Je vendais des colliers de fleurs aux touristes… même si j’étais aussi touriste qu’eux», raconte-t-elle en riant.

Bien qu’elle ait remporté plusieurs courses régionales durant sa vie d’adulte, on ressent encore un brin de nostalgie chez Dorothée Garant. D’autant plus que la course à pied a maintenant été effacée de son horaire, en raison de maux de dos. «J’aurais aimé compétitionner contre mes enfants (qui sont tous deux d’excellents athlètes) et leur démontrer que j’étais une bonne coureuse. Malgré tout, je peux quand même faire du vélo et nous avons d’ailleurs réalisé un duathlon en équipe au cours des deux dernières années. Ce fut une très belle expérience», reconnaît celle dont l’esprit de compétition est toujours bien présent.

Passionnée par son travail à l’urgence et son implication dans le programme Pro-Cœur – pour les patients aux prises avec des problèmes cardiaques – , Dorothée Garant n’aurait jamais cru bifurquer vers la médecine esthétique. «J’ai commencé par donner un coup de main occasionnel dans une clinique de Magog, il y a 10 ans. Le déclic, je l’ai eu lorsque j’ai traité une ancienne patiente de Pro-Cœur. J’ai réussi à embellir la cicatrice laissée par son opération au cœur et j’ai vu l’impact positif chez cette dame», laisse-t-elle entendre.

«Il y a parfois des changements esthétiques qui peuvent nous paraître superficiels, mais je crois aussi que dans bien des cas, ça augmente la qualité de vie des gens».

Propriétaire de la Clinique médico-esthétique PO+ depuis six ans, Dr Garant se compte chanceuse de pouvoir mener une vie équilibrée malgré un horaire professionnel bien rempli. «Je ne veux pas ouvrir d’autres succursales, car j’aime bien voir moi-même mes patients et je veux parallèlement continuer à pratiquer mon métier à l’urgence. Depuis que je suis dans la quarantaine, j’apprécie beaucoup ma qualité de vie», avoue-t-elle.

Médecine en direct

Carburant à l’adrénaline et au besoin de venir en aide aux gens en difficulté, Dorothée Garant est souvent intervenue dans des situations critiques, dans le cadre de son travail.

«J’ai déjà réanimé un patient au beau milieu de l’autoroute, durant son transfert de Magog à Sherbrooke. Puisqu’on devait lui administrer un électrochoc, il fallait stopper l’ambulance et sortir la civière de l’habitacle… tout ça au  beau milieu des automobiles qui attendaient.  Le gars derrière nous a eu droit à une réanimation en direct».

Peu importe la situation, Dorothée Garant n’a jamais hésité jamais à porter secours à des gens en difficulté, qu’elle soit en fonction ou non.

C’est d’ailleurs elle qui a été la première à secourir la conseillère municipale Nathalie Pelletier, lorsqu’elle cette dernière est entrée en collision avec une voiture alors qu’elle circulait à vélo, l’été dernier sur la route 112. «J’étais moi-même à vélo et je suis arrivée sur place par hasard. Je me suis assurée qu’elle était hors de danger, et lorsque les premiers répondants sont arrivés, je me suis effacée», raconte-elle humblement.

Comme tous ses collègues, Docteur Garant apprécie le fait de pouvoir contribuer à la santé de nombreux patients. Elle reconnaît toutefois que le travail de médecin peut s’avérer une montagne russe d’émotions. «C’est valorisant de sauver des vies. Mais, ça m’est déjà arrivé aussi d’être en petite boule dans un coin après une soirée à l’urgence. Quand un patient décède, tu te demandes toujours si tu en as fait suffisamment», avoue-t-elle.

De nombreuses implications… jusqu’au Honduras

Parce que ses enfants (Mathieu 21 ans et Rosemarie 15 ans) sont maintenant plus autonomes et que sa carrière fonctionne rondement, Dorothée Garant se permet d’augmenter ses implications communautaires.

Au cours de la dernière année, elle a notamment agi comme présidente d’honneur de l’activité «Vins et fromages» de la Banque alimentaire, un organisme qu’elle supportait déjà par le biais de sa clinique.

La Grande virée artistique, Han-Logement et la Fondation Brigitte-Perreault sont d’autres organismes auxquels elle prête sa contribution.

Annuellement, elle s’offre également un «pèlerinage» de médecine humanitaire au Honduras durant quelques semaines, pour soigner gratuitement des citoyens en milieu défavorisé. «Je n’ai aucun revenu durant cette période, mais c’est un peu comme si je me faisais un cadeau; ça fait tellement de bien de donner. C’est exactement le genre de médecine que je voulais faire lorsque j’ai commencé mes études», explique-t-elle.

Lors de sa dernière visite au Honduras, elle a eu la chance d’être accompagnée de son fils Mathieu, lui-même étudiant en médecine. «On nous a emmenés dans une prison pour soigner les prisonniers, et c’était le dur à cuire de la place qui nous servait de guide».

Lorsqu’on nous a servi du poulet pour le repas, j’ai demandé, par insouciance, si je pouvais avoir un couteau. J’ai à peine eu le temps de réaliser la pertinence de ma question que notre guide sortait un poignard de son pantalon. Finalement, je n’ai pas osé lui demander où il avait pris ça», conclut-elle avec humour.