Tribune libre: ex-Difco, l’obscurité a assez duré

Le Collectif du quartier des Tisserands a finalement décidé de déposer un recours devant le Tribunal administratif du Québec pour contester l’évaluation municipale de l’ancienne filature Difco. Au dernier jour du délai qui lui était imparti, le Collectif a décidé que l’obscurité avait assez duré.

L’obscurité, c’est d’abord l’absence d’électricité dans les bâtiments. Obscurité qui amène depuis plusieurs mois les policiers à ne plus intervenir sur les lieux même si des délits s’y commettent et que des citoyens le leur signalent.

L’obscurité, c’est aussi l’absence de lumière sur ce que la Ville veut vraiment faire pour sauver de la destruction ces bâtiments patrimoniaux pour la sauvegarde desquels elle a pourtant dépensé des dizaines de milliers de dollars en études depuis 2008. Également, sur ce qu’elle entend faire pour donner enfin accès à la rivière et à un parc aux citoyens du quartier.

L’obscurité, c’est enfin l’absence de réponses convaincantes pour expliquer que, depuis 2012 et jusqu’au début de septembre de cette année, les propriétaires successifs de cette ancienne filature ne payaient qu’environ 1,50 $ de taxes par année avec une évaluation à 0 $ pour tous les bâtiments et à 200 $ pour le vaste terrain de 470 000 pieds carrés.

Depuis quelques mois, notre Collectif a fait la lumière sur l’iniquité entre le montant de taxes payées par les citoyens du quartier par rapport aux taxes payées par les propriétaires de l’ex-Difco et de l’ex-CS Brooks quand on compare des superficies équivalentes de terrain.

Notre Collectif a aussi constaté que la Ville elle-même avait payé 6 333 $ au propriétaire Anahid Hospitality Management inc. pour 44 espaces de stationnement pour son personnel pendant la construction de la nouvelle caserne des pompiers, non sans savoir que ce même propriétaire ne payait que 1,50 $ de taxes par année. La Ville a même dû retenir 2 833,40 $ de son paiement pour compenser des sommes qui lui étaient dues par le propriétaire!

Enfin, notre Collectif a aussi découvert que, depuis le 1er janvier 2016, Anahid Hospitality Management inc. loue 150 espaces de stationnement au CIUSSS, au prix de 2 000 $ par mois, pour les besoins de l’hôpital de Magog. À elle seule, cette location lui rapporte 24 000 $ par année depuis bientôt 4 ans, alors qu’elle ne payait toujours que 1,50 $ de taxes par année.

Devant tant de mystères, un citoyen du quartier, appuyé par plus d’une quinzaine d’autres citoyens et par notre Collectif, a contesté l’évaluation municipale de l’ancienne filature juste avant la fin d’avril 2019 comme prescrit par la loi.
À la fin du mois d’août, l’évaluateur a donné les réponses suivantes pour les deux points soumis à son attention :
1) «Nous sommes d’avis que l’immeuble est évalué en respect de la Loi sur la fiscalité municipale». Il n’a cependant présenté aucun motif pour expliquer cette position ni donné accès à son dossier d’évaluation, contrairement à ce que prévoit la loi.
2) Pour le lot vacant situé en face de l’usine (qui devrait être évalué comme les lots voisins puisqu’il n’a aucune vocation industrielle), l’évaluateur écrit : «Il fait partie de l’unité d’évaluation puisqu’il a depuis longtemps été associé à l’usine en respect de l’article 34 de la Loi sur la fiscalité municipale». Pourtant, les 2 derniers paragraphes de l’article 34 disent bien que ce terrain pourrait parfaitement être évalué et taxé de manière indépendante du terrain de l’usine, en toute équité pour les propriétaires voisins.
Le Collectif a donc décidé de contester les conclusions de l’évaluateur municipal et de porter ce dossier devant le Tribunal administratif du Québec. L’évaluateur municipal n’aura d’autre choix que de justifier rigoureusement pourquoi il a baissé l’évaluation de l’ex-Difco tout juste après sa fermeture de la DIFCO en 2011 et pourquoi il n’a pas réévalué le terrain vacant en face. La décision du juge, après avoir entendu les deux parties, sera finale. Ce sera la fin de l’obscurité…

 

Collectif du Quartier des Tisserands