Chronique: Southière-sur-le-Lac, un premier domaine acheté 60 $

D’abord occupé par les Iroquois, qui y pratiquent une culture primitive, le futur site de Southière-sur-le-lac sera plus tard fréquenté par les tribus algonquines, puis par les Abénaquis et les Sokoquis en provenance de la Nouvelle-Angleterre. Les Iroquois doivent finalement retourner vivre dans la vallée du Saint-Laurent.

Connu sous le nom de Castlebrook Farm, une vaste propriété située sur la rive ouest du lac Memphrémagog, s’étend par la suite de la plage municipale actuelle jusqu’au ruisseau Castle, et inclut la plus belle plage ensablée du lac. En 1858, le capitaine John Wright, veuf, arrive d’Angleterre avec ses 4 enfants et il s’établit à Sherbrooke. En 1860, à l’occasion d’une excursion de pêche, John Wright est frappé par la beauté du lac et des paysages. Il aime ce qu’il voit et il décide d’acheter ce domaine, devenu propriété de la Couronne. Il l’acquiert de George Frederick Bowen, shérif pour le District de Saint-François, pour la somme de 60 $. L’endroit, d’abord connu sous le nom de Castlebrook Farm, sera désormais connu sous le nom de Wright’s Beach pendant plus de cent ans. 

Beaucoup d’activités à la Wright’s Beach

Depuis les années 1870, on y tient des pique-niques, des événements de toutes sortes, tels que régates, épreuves de natation, matchs de crosse, etc. Ainsi, le 26 août 1879, on assiste en grand nombre à un match de crosse entre Sherbrooke et Saint-Jean-d’Iberville. Dans son journal intime, Ralph Merry V écrit : «Sherbrooke a remporté la victoire, comme à l’habitude». Le 10 août 1880, à l’occasion d’un autre match, il note «…thousands of people in Magog today». Une importante régate a lieu en 1884 et d’autres sont tenues sur une base quasi annuelle depuis 1931. On assiste à des épreuves de natation dont une célèbre le 21 juillet 1935 qui attire plus de 4 000 spectateurs. Pour les régates de 1938 et 1939, on y installe des estrades. Tous ces événements tenus à Wright’s Beach sont très populaires et attirent des foules de l’extérieur.

Au décès du capitaine Wright le 1er avril 1874, son fils, Alfred Lawson Wright (1840-1918), prend la relève et exploite la ferme. En 1883, à l’occasion de la construction des usines de la Magog Textile and Print Co., Alfred Lawson y construit une fabrique de briques qui emploie quelque 40 ouvriers. Le rôle joué par cette briqueterie dans la construction des usines de Magog, et son devenir, demeurent inconnus à ce jour. Au décès du fils le 13 juin 1918, la ferme passe aux mains de sa sœur, Louisa Charlotte Wright Hall, épouse du docteur James B. Hall (1842-1877), exerçant à Magog depuis 1867.

Broadbent vend à Southière

Au rôle d’évaluation du Canton de Magog de 1931, la propriété appartient à Louisa Charlotte Wright-Hall et elle est occupée par James Broadbent, qui l’exploite comme ferme laitière. Il s’en portera acquéreur plus tard. Entre 1945 et 1949, Broadbent vend 185 acres au notaire Gérard Southière de Granby, qui achète 205 acres additionnelles de deux autres propriétaires, pour un total de 390 acres. Broadbent continue d’habiter la maison de ferme jusqu’au milieu des années 1950.

La propriété achetée par le notaire Southière est subdivisée en lots à construire. Le premier chalet, érigé par le docteur Roger Guertin en 1945, est aujourd’hui disparu. Dès 1946, un premier puit artésien est creusé et on assiste à l’arrivée de l’électricité et du téléphone. La plage demeure accessible au public et un casse-croûte y est construit. Plusieurs autres habitations y seront rapidement érigées, notamment par des villégiateurs de Granby et de Magog.

Le 23 juillet 1947, une première messe est célébrée à la plage par l’abbé Laurent Ward de Granby sur la véranda du chalet de Gérard Southière. D’où le nom de l’actuel parc Ward à proximité de la chapelle. En 1954, à l’initiative du docteur Roger Guertin, qui finance en partie le projet, une chapelle est construite. Elle est bénie, sous le vocable de Notre-Dame-de-la-Plage par Mgr Léon Bouhier qui y célèbre la première messe le 27 juin 1954. L’abbé Paul-Émile D’Arcy est le premier desservant de cette desserte de la paroisse Saint-Patrice. Au fil des ans, la chapelle est devenue le lieu de nombreux rassemblements communautaires et les célébrations religieuses ont cessé. 

La Wright’s Beach devient la Plage Southière

Le 4 août 1958, le Canton de Magog change officiellement le nom de Wright’s Beach pour Plage Southière, qui deviendra Southière-sur-le-Lac, en 1975. Cependant, ce n’est que le 5 janvier 1984 que la Commission de toponymie du Québec officialise ce dernier toponyme.

Le 29 décembre 1952, le notaire Southière avait obtenu l’incorporation d’une nouvelle compagnie, «Plages modernes limitée», à laquelle il transférait une partie de ses immeubles, incluant les plages et les parcs. Le 20 septembre 1975, 36 propriétaires s’opposent à un changement du règlement de zonage qui aurait permis de construire sur les plages. Le 20 octobre 1975, l’Association des propriétaires de la Plage Southière (APPS), récemment fondée, achète du notaire Southière les terrains appartenant à Plages modernes Ltée, afin de prévenir des constructions et de conserver ces espaces communautaires à la disposition des quelque 300 membres de l’association (APS).