Ottawa mettra fin lundi à l’obligation vaccinale pour voyageurs et fonctionnaires

OTTAWA — Le passeport vaccinal ne sera plus exigé à compter de lundi pour les voyages intérieurs et internationaux, pour le secteur du transport sous réglementation fédérale et pour les employés du gouvernement fédéral, a confirmé Ottawa mardi.

«Le contexte a changé», a tranché le ministre de la Santé, Jean-Yves Duclos, lors d’une conférence de presse à Ottawa en prévenant que si la situation sanitaire se dégrade, une exigence pourrait revenir.

Les taux d’immunisation sont meilleurs en raison à la fois de la vaccination et du nombre de personnes infectées, il y a une plus grande accessibilité aux antiviraux et les taux d’hospitalisation sont plus bas et en diminution, a-t-il énuméré.

En annonçant les «assouplissements» aux règles, Ottawa a cependant précisé que les exigences actuelles en matière de vaccination à la frontière canadienne resteront en vigueur pour les voyageurs entrant au Canada «parce que les taux de vaccination et le contrôle du virus dans les autres pays varient considérablement». Autrement dit, s’ils ne sont pas vaccinés, ils devront notamment présenter un résultat valide de test préalable à l’entrée.

Par ailleurs, le port du masque demeure obligatoire au cours du trajet des voyageurs à bord d’avions ou de trains au Canada, et ce, même s’il ne sera plus requis au cours des prochains jours dans les transports en commun de plusieurs régions du pays.

Il s’agit selon la santé publique d’une mesure «efficace et peu coûteuse» qui protège dans les milieux où l’espace est restreint et les contacts étroits, a dit M. Duclos. C’est aussi un «inconvénient mineur» qui procure des avantages aux passagers vulnérables à leurs côtés, a renchéri le ministre des Transports, Omar Alghabra.

Et Ottawa entend continuer de demander d’utiliser l’application ArriveCAN. M. Alghabra a insisté que c’est «un outil très utile» pour s’assurer que les voyageurs entrants ont leurs preuves de vaccination, ce qui réduit le nombre de questions posées à la frontière.

«Même deux doses de vaccin protègent contre la maladie sévère (…) et nous voulons nous assurer que les voyageurs entrants sont minimalement vaccinés», a déclaré M. Alghabra.

L’Agence de la santé publique du Canada a signalé une baisse constante du nombre de cas de COVID-19 au pays, bien que les provinces n’offrent plus au grand public de dépistage par tests moléculaires PCR et que les bilans fédéraux soient devenus moins précis. 

Le gouvernement faisait face à une pression croissante de la part des associations de tourisme et de voyage pour supprimer la vaccination obligatoire des voyageurs, afin d’atténuer les délais dans les aéroports du Canada et d’aligner les règles fédérales sur les mesures de santé publique provinciales.

L’industrie du voyage a imputé aux mesures sanitaires fédérales les ralentissements aux douanes dans les aéroports canadiens, qui ont contribué à de longues attentes pour les passagers, voire à des vols retardés ou des annulations.

Le ministre des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, a cependant soutenu mardi que la décision d’Ottawa était basée sur les données probantes de la science, et non sur la situation dans les aéroports. 

M. LeBlanc a prévenu du même souffle que les ajustements «n’auront pas un impact immédiat sur les délais dans les aéroports».

D’autres mesures sont prises pour y faire face, a réitéré le ministre Alghabra, notamment une augmentation «significative» du nombre de douaniers et d’employés affectés à la sécurité, ainsi que le retrait des tests aléatoires.

Ottawa avait déjà annoncé la semaine dernière la suspension des tests aléatoires effectués dans les aéroports pour les voyageurs vaccinés —  on prévoyait déplacer ces dépistages hors site d’ici le mois prochain. Mais après cette annonce, la Table ronde canadienne du voyage et du tourisme demandait au gouvernement d’aller plus loin encore: mettre fin à la vaccination obligatoire pour les voyageurs et le personnel des aéroports du Canada. C’est notamment ce qu’Ottawa annonce mardi.

Voyages intérieurs et fonction publique

Le passeport vaccinal ne sera plus exigé non plus dans les trains et les autobus au pays, permettant aux Canadiens non vaccinés de se déplacer plus librement.

Le changement affectera également les travailleurs fédéraux qui avaient été mis en congé sans solde en raison de leur statut vaccinal. Le gouvernement n’a pas révélé combien d’employés avaient été ainsi mis en congé forcé, mais rapporte que 98,5 % des fonctionnaires sont entièrement vaccinés, avec deux doses.

L’Alliance de la fonction publique du Canada a déposé par principe un grief contre le gouvernement, plus tôt cette année, au nom des fonctionnaires mis en congé sans solde, mais également au nom des fonctionnaires qui sont en télétravail mais qui devaient aussi être vaccinés, sans quoi ils risquaient de perdre leur salaire. Plusieurs autres syndicats du secteur public ont entrepris des contestations similaires.

Dans une déclaration transmise à La Presse Canadienne, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada s’est réjoui de cette «bonne nouvelle», ayant «insisté» pour que la politique «reflète la situation actuelle de la pandémie».

Le premier ministre Justin Trudeau avait annoncé la vaccination obligatoire pour les travailleurs fédéraux et les voyageurs nationaux lors de la campagne électorale de l’été 2021, avant que la vague Omicron ne frappe de plein fouet le Canada.

Le gouvernement n’a pas caché qu’il espérait ainsi que cette obligation exercerait une pression sur les Canadiens qui n’étaient pas vaccinés, affirmant par ailleurs que cette décision était nécessaire pour protéger la population contre les maladies graves et la transmission du coronavirus.

Une fois que l’Omicron a submergé le pays, des membres de l’opposition et certains experts ont commencé à remettre en question l’efficacité de cette vaccination obligatoire, car le variant était toujours transmissible chez les personnes considérées comme pleinement immunisées.

Par contre, d’autres experts en santé publique ont appelé le gouvernement à ajouter une troisième dose au passeport vaccinal, pour se protéger contre les maladies graves. «Deux doses ne suffisent pas pour assurer l’efficacité du vaccin contre l’infection à Omicron», déclarait encore vendredi dernier la responsable de la santé publique du Canada, la docteure Theresa Tam.

Alors que plus de 89 % des Canadiens de plus de 12 ans ont reçu au moins deux doses d’un vaccin approuvé contre la COVID-19, seulement 55 % d’entre eux environ ont reçu une injection de rappel — la «troisième dose».

La docteure Tam a déclaré que les décisions politiques concernant le passeport vaccinal étaient prises par les membres du cabinet, mais qu’elle leur fournit des données pour étayer leurs décisions. «Ce ne sont toutefois pas les seules informations que les employeurs ou les ministres concernés doivent prendre en compte», a-t-elle précisé.