Le lock-out au port de Montréal pourrait avoir des conséquences «catastrophiques»

MONTRÉAL — La fermeture du port de Montréal par l’Association des employeurs maritimes aura des conséquences «catastrophiques» si elle dure plusieurs jours, prévient l’Administration portuaire de Montréal.

Le syndicat des débardeurs, quant à lui, affirme que c’est l’Association des employeurs (AEM) qui est responsable du «merdier dans lequel on est», puisque c’est elle qui a choisi de stopper les activités pour forcer le gouvernement fédéral à adopter une loi spéciale.

L’association des employeurs a mis les 1200 débardeurs du port de Montréal en lock-out, dimanche soir à 21 h. Bien que des services essentiels soient maintenus, la majorité des activités sont affectées.

«Dans ce contexte, l’AEM réitère sa demande au ministre du Travail, Steven MacKinnon, d’intervenir pour dénouer l’impasse le plus rapidement possible», a affirmé l’association des employeurs.

Les débardeurs refusaient de faire des heures supplémentaires depuis le 10 octobre. Aussi, environ 320 d’entre eux faisaient une grève partielle, touchant seulement deux terminaux de l’entreprise Termont.

Mais l’Association des employeurs maritimes a décidé de décréter un lock-out, dimanche soir, parce que les débardeurs ont rejeté son offre finale et globale, au cours d’un scrutin secret.

Au cours d’une conférence de presse au port, tôt lundi matin, la présidente et directrice générale de l’Administration portuaire, Julie Gascon, a déploré les répercussions économiques de cette quasi-paralysie du port.

Une seule journée du port, c’est 400 millions $ de valeur de marchandises qui transitent et 268 millions $ en retombées économiques, a-t-elle souligné.

Le port de Montréal est le principal port de l’Est du Canada. Ses principaux concurrents sont les ports de l’Est des États-Unis.

Mme Gascon soutient que si la fermeture persiste, les lignes maritimes vont se détourner du port de Montréal vers ceux des États-Unis. «C’est notre réputation qui se joue» en termes de fiabilité, dit-elle.

Au cours d’une autre conférence de presse, le syndicat s’est dit prêt à reprendre la négociation n’importe quand avec l’association des employeurs. Le conseiller syndical du Syndicat canadien de la fonction publique, affilié à la FTQ, Michel Murray, a noté que le syndicat avait même loué des salles dans un hôtel pour reprendre la négociation.

Il s’est dit prêt à signer un contrat de travail de longue durée, «avec des garde-fous pour s’assurer de l’application de la convention collective en cours de route». Mais la question des horaires — soit le principal point en litige — doit être réglée sur le fond, prévient-il.

Il affirme que l’association des employeurs ne répond pas aux invitations du président du syndicat et ne veut tout simplement pas négocier. Il soupçonne l’Association des employeurs maritimes de faire pression sur le gouvernement Trudeau pour qu’il adopte une loi spéciale mettant fin au conflit — d’autant plus qu’un autre lock-out a été décrété en même temps au port de Vancouver, touchant les contremaîtres.

C’est d’ailleurs ce qui était arrivé lors de la précédente négociation. Le tout s’était soldé par une loi spéciale forçant le retour au travail. C’est un arbitre qui avait été mandaté pour définir les clauses en suspens de la convention collective.

«Clairement, quand on regarde ce qui se passe: le lock-out à Vancouver, le lock-out à Montréal, on considère que c’est un tir groupé, coordonné, planifié, afin de faire monter la pression auprès du gouvernement pour qu’il intervienne dans notre dossier, soit par une loi spéciale ou par l’article 107, comme il l’a fait dans le rail», a tonné M. Murray.

Dans le cas du rail, au CN et au CPKC, Ottawa a eu recours à une mesure exceptionnelle: un arbitrage exécutoire.

C’est donc l’impasse totale: l’AEM et le syndicat des débardeurs s’étaient rencontrés au Service de médiation et de conciliation du fédéral, vendredi dernier, sans marquer de progrès. Le syndicat venait de recevoir l’offre finale et globale de l’AEM. Depuis, ses membres ont voté et 1083 d’entre eux ont rejeté cette offre, alors que seulement 3 l’ont acceptée, a précisé M. Murray.

Quant aux associations d’entreprises, elles ont toutes déploré la situation.

Manufacturiers et Exportateurs du Québec demande au gouvernement fédéral de mettre fin au conflit, rappelant que d’autres entreprises en souffrent aussi.

«Depuis le début de ce conflit, les entreprises et notre économie en paient le prix. Chaque jour où les activités au port sont arrêtées, des impacts économiques de près de 91 millions $ se font ressentir au Québec. Non seulement le gouvernement doit intervenir, MEQ demande aussi des solutions à long terme pour que la série de conflits de travail au port cesse, notamment en considérant les services portuaires comme des services essentiels», a commenté Julie White, vice-présidente aux affaires publiques et porte-parole par intérim.