La Cour suprême refuse d’entendre Mascouche pour la protection d’un milieu naturel

MONTRÉAL — L’Union des municipalités du Québec (UMQ) se tournera vers Québec pour faire changer les lois après l’échec de la Ville de Mascouche devant la Cour suprême.

Le plus haut tribunal du pays a annoncé, jeudi, qu’il refuse d’entendre l’appel de la municipalité lanaudoise, qui cherchait à établir son autorité en matière de protection du territoire. La Cour suprême, comme toujours, n’a pas donné d’explication pour son refus.

Le dossier de Mascouche se voulait une cause-type pour assurer la protection des milieux naturels, mais la décision confirme que le cadre légal actuel limite considérablement le pouvoir municipal.

La Ville de Mascouche cherchait à protéger un terrain boisé d’environ 10 hectares qui avait été légué à une dame, Ginette Dupras, par sa tante pour la somme symbolique de 1 $ en 1976.

À l’époque, un peu moins du tiers de ce terrain était destiné à la conservation, le reste devant éventuellement être dédié au développement résidentiel. Cependant, en 2006, Mascouche avait décidé de protéger la totalité de ce terrain en le zonant «conservation» au complet. 

Mme Dupras, qui avait appris ce changement de zonage deux ans plus tard, avait alors entamé des discussions avec la Ville pour le rachat du terrain. En 2015, celui-ci avait été évalué à 4,5 millions $, une somme que Mascouche refusait de payer.

La propriétaire avait poursuivi la Ville pour expropriation déguisée et la Cour supérieure lui avait donné raison, mais avait condamné Mascouche à lui verser seulement 436 000 $. Tant la Ville, qui n’acceptait pas la décision, que Mme Dupras, qui était insatisfaite de la somme versée, étaient allées en appel. En mars dernier, la Cour d’appel avait confirmé qu’il s’agissait d’une expropriation déguisée et ordonné à la Cour supérieure de revoir la compensation à la hausse, mais avait aussi confirmé que le changement de zonage de Mascouche était valide. 

Indemniser les propriétaires de milieux naturels

Cette décision finale du plus haut tribunal laisse entendre que les municipalités qui voudront protéger des milieux naturels n’auront d’autre choix que d’indemniser les propriétaires de terrains qui s’estimeront lésés parce qu’ils n’auront pas pu construire d’immeubles.

L’UMQ s’inquiète de cette décision et son président et maire de Gaspé, Daniel Côté, entend demander au prochain détenteur du portefeuille des Affaires municipales de préparer une révision du cadre légal afin de permettre aux Villes de protéger les milieux naturels sur leurs territoires.

«Il est nécessaire de clarifier l’intention du législateur en matière d’expropriation déguisée pour assurer l’uniformité et la prévisibilité du droit au Québec et au Canada, et ainsi s’assurer que les municipalités soient mieux protégées d’éventuelles poursuites judiciaires lorsqu’elles agissent pour aménager des espaces naturels sur leur territoire», a déclaré M. Côté par voie de communiqué.

Selon lui, cette question doit être au cœur du plan de mise en œuvre de la Politique nationale d’architecture et d’aménagement du territoire (PNAAT), qui est attendue à l’hiver 2023.

«Ce dossier sera l’un des premiers dont je discuterai avec la personne qui sera nommée ministre des Affaires municipales dans le prochain gouvernement et l’Union s’assurera qu’il soit à l’ordre du jour des discussions entourant la mise en œuvre de la PNAAT au cours des prochains mois», a-t-il ajouté.