Climat: lancement réussi pour trois satellites montréalais détecteurs de GES

MONTRÉAL — L’entreprise montréalaise GHGSat, qui détecte avec une rare précision les émissions de méthane produites par les Terriens, a maintenant une constellation de six satellites dans l’espace, grâce au lancement de trois nouveaux satellites mercredi depuis la Floride.

Vers 14h35, la fusée SpaceX Falcon 9, de l’entreprise américaine SpaceX, a pris son envol, avec à bord trois satellites dans le cadre de la mission Transporter-5.

Stéphane Germain, chef de la direction de GHGSat, a assisté au décollage à partir d’un site de la NASA,  à Cap Canaveral en Floride.

«Ç’a été une journée spectaculaire, on est très content d’avoir vu la fusée partir sans problème», a indiqué Stéphane Germain, quelques minutes après le décollage de l’engin spatial, en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne.

Les satellites, Luca, Diako et Penny, portent les prénoms des enfants de membres de l’entreprise que Stéphane Germain a fondée.

«Ils portent les noms des enfants pour qu’on se rappelle toujours pourquoi on fait ce qu’on fait», a indiqué le fondateur de GHGSat, en soulignant «l’importance de lutter contre les changements climatiques».

«Nous avons plusieurs autres lancements prévus d’ici à la fin de 2023, afin de porter notre constellation à dix satellites», a ajouté Stéphane Germain, chef de la direction de GHGSat.

À Montréal, près du siège de l’entreprise sur le boulevard Saint-Laurent, des dizaines d’employés s’étaient réunis pour regarder en direct le lancement sur des écrans géants.

«Je suis très excité, c’est une grosse étape que d’avoir trois satellites de plus»  a expliqué Marianne Girard, spécialiste en imagerie satellite chez GHGSat, en précisant qu’en doublant la quantité de l’équipement en orbite, l’entreprise pourra «doubler sa capacité, donc plutôt que de voir un endroit dans le monde une fois par six jours, on peut le voir une fois par trois jours».

Avec la fierté dans les yeux et le sourire aux lèvres, Eric Edwards, chef de la technologie de GHGSat, a expliqué à La Presse Canadienne que les trois nouveaux satellites ont une capacité de détection beaucoup plus puissante que les autres satellites que l’entreprise a envoyés dans l’espace depuis 2016.

«Nous avons également besoin de plus de satellites, car nous avons de plus en plus de clients», a mentionné Eric Edwards.

Les données de GHGSat sont utilisées par des entreprises, des gouvernements et des organismes de réglementation.

La PME québécoise se targue d’être le seul système satellitaire au monde capable de détecter à haute résolution les gaz à effet de serre, comme ceux provenant de sites pétroliers ou de sites d’enfouissement. Ces informations sont essentielles pour élaborer des politiques de lutte et d’adaptation aux changements climatiques.

Répertorier et comptabiliser les GES 

Répertorier et comptabiliser toutes les sources d’émissions de GES est un défi de taille. 

Les États et les grandes entreprises doivent se munir d’instruments de mesure précis pour atteindre leurs engagements de réduction des GES et GHGSat se concentre sur la mesure du méthane, un puissant gaz à effet de serre.

Débusquer les tricheurs

Les satellites de GHGSat peuvent également servir à «débusquer les tricheurs» et s’assurer que les pays et les entreprises soient honnêtes et transparents concernant la quantité de méthane qu’ils émettent.

Il y a quelques semaines, l’Agence internationale de l’énergie a déclaré que de nombreux pays sous-déclaraient considérablement leurs émissions de méthane.

Un gaz beaucoup plus puissant que le CO2

En novembre dernier à la conférence de Glasgow sur le climat, une centaine de pays se sont engagés à réduire de façon radicale leurs émissions de méthane. C’est d’ailleurs à l’occasion de la COP26 que le gouvernement fédéral a annoncé une aide de 20 millions de dollars à l’entreprise du boulevard Saint-Laurent.

GHGSat fournit notamment ses données à l’Observatoire international des émissions de méthane (IMEO), un organisme qui relève de l’ONU.

Un récent rapport de cette organisation souligne que le méthane rejeté directement dans l’atmosphère est environ 80 fois plus puissant que le dioxyde de carbone (CO2) sur une période de 20 ans.

D’ailleurs, une étude publiée lundi par l’Institut pour la gouvernance et le développement durable (IGSD), établi à Washington, révèle que les réductions de CO2 seules ne permettront pas d’empêcher une augmentation des températures supérieure à 1,5 °C par rapport aux températures de l’ère préindustrielle, comme le prône l’Accord de Paris sur le climat.

Les chercheurs de l’IGSD insistent sur l’importance de s’attaquer au méthane, pour éviter la catastrophe climatique.