Les catastrophes climatiques ont «seulement» coûté 268G$US en 2022

L’année qui s’achève a été le théâtre d’une inondation horrible qui a englouti le tiers du Pakistan, d’un des trois ouragans les plus coûteux de l’histoire des États-Unis, de sécheresses dévastatrices en Europe et en Chine, d’une famine causée par la sécheresse en Afrique et de canicules un peu partout.

Et pourtant, ça a déjà été pire.

Même avec tous ces dégâts et toutes ces pertes de vie, le coût des dommages causés par les catastrophes climatiques a reculé à 268 milliards $ US cette année, un déclin de 12 % comparativement à plus de 300 milliards $ US en 2021, selon le grand réassureur Swiss Re.

Ces catastrophes climatiques, dont certaines ont été exacerbées par les changements climatiques d’origine humaine, se produisent si fréquemment que l’avalanche de cette année, qui aurait fracassé des records il y a vingt ans, fait presque figure de répit.

Bienvenue à la nouvelle anormalité.

«Nous nous sommes presque habitués aux extrêmes. Et cette année pourrait sembler particulièrement intense si on la compare aux années précédentes, mais si on la compare aux années les plus intenses, comme 2017 et 2020 et 2021… on dirait un léger ajustement à la baisse, a dit l’économiste et météorologue Adam Smith, de l’agence américaine NOAA. On commence à s’y habituer, mais ce n’est pas une bonne façon d’affronter l’avenir.»

On a recensé cette année aux États-Unis des catastrophes qui ont causé des pertes d’au moins un milliard de dollars dans toutes les catégories, exception faite des tempêtes hivernales : ouragans, inondations, sécheresses, canicules, feux de forêt, tempêtes de grêle et même une puissante tempête de vent appelée «derecho».

M. Smith a dit que NOAA n’a pas encore fini de comptabiliser les dommages causés par l’ouragan Ian, qui a frappé la Floride de plein fouet, mais qu’ils excéderont probablement les 100 milliards $ US, ce qui lui vaudrait le troisième rang derrière les ouragans Katrina en 2005 et Harvey en 2017.

Dans les années 1980, une catastrophe climatique causant des dommages d’au moins un milliard de dollars survenait tous les 82 jours aux États-Unis; aujourd’hui, c’est tous les 18 jours, même en tenant compte de l’inflation.

Mondialement, «si on se concentre sur les six dernières années, entre 2017 et 2022, ça a été particulièrement pénible», surtout en comparaison avec les cinq années précédentes, a dit un des dirigeants de Swiss Re, Martin Bertogg.

«On aurait dit un changement de régime, certains ont qualifié ça de nouvelle normalité», a-t-il expliqué. Il y voit plutôt un retour, après une brève pause, à une tendance à long terme qui voit le coût des catastrophes augmenter de 5 % à 7 % par année.

«De plus en plus de preuves scientifiques montrent que les changements climatiques accentuent la variabilité aussi bien que la moyenne» des catastrophes climatiques, a dit le professeur Chris Field, de l’université de Stanford. Ça veut dire que certaines années nous malmènent plus que d’autres. Lors de certaines années, on est frappés comme jamais auparavant.»

«La chose importante est que la tendance des désastres augmente, a-t-il ajouté. Et ça va continuer à augmenter jusqu’à ce qu’on mette fin au réchauffement.»

Regarder les dommages, qui sont surtout des pertes assurées, peut donner un portrait difforme de la situation, puisque le coût d’une catastrophe dépendra grandement de la richesse de la région touchée, et moins de l’ampleur de la catastrophe elle-même, a souligné Debarati Guha-Sapir, de l’Université catholique de Louvain, en Belgique.

Encore plus important, ces chiffres concernent des dollars et non des gens, ce qui déforme aussi la situation, ont dit Mme Guha-Sapir et la professeure Kristie Ebi de l’Université de Washington, comme les inondations qui ont fait quelque 1700 morts au Pakistan.

Même si les changements climatiques sont clairement en cause, M. Bertogg, de Swiss Re, estime que les deux tiers ou plus de la hausse des dommages sont attribuables au fait que plus de gens et de biens sont en péril.. Bertogg, de Swiss Re, estime que les deux tiers ou plus de la hausse des dommages sont attribuables au fait que plus de gens et de biens sont en péril.

L’urbanisation à travers le monde place plus de gens dans des environnements denses, ce qui gonfle la facture quand un catastrophe survient, a-t-il dit. L’étalement urbain rend aussi les villes plus vulnérables, a-t-il ajouté, citant en exemple les feux de broussailles qui détruisent de plus en plus de maisons construites dans les collines californiennes.

On retrouve aussi de plus en plus de constructions le long des côtes et des cours d’eau, les rendant plus vulnérables aux tempêtes et aux inondations, ces dernières représentant «la pire menace pour l’économie mondiale», a dit M. Bertogg.