Le policier Savage de nouveau critiqué en déontologie
JUSTICE. Ayant reçu un blâme en déontologie policière en 2023, le policier de la Régie de police de Memphrémagog (RPM), Philippe Savage, est de nouveau critiqué par la justice, cette fois-ci pour ne pas avoir préservé la confiance et la considération requises par ses fonctions.
Le policier s’est retrouvé au Tribunal administratif de la déontologie policière pour des événements survenus à Magog, en janvier 2020, en lien avec l’interception d’une conductrice qui n’aurait pas respecté un arrêt obligatoire. Ce qui devait être une opération de routine s’est finalement conclu par une plainte de la citoyenne, estimant que l’agent avait tenu des propos injurieux à son égard, fondés sur son âge, en plus de s’être comporté de façon irrespectueuse et avec impolitesse.
Après cinq journées d’audience tenues plus tôt cette année, la juge administrative Sylvie Séguin a rendu sa décision le 12 novembre dernier, dans laquelle elle dresse un portrait peu flatteur du policier. Elle conclut d’abord que le témoignage du sergent Savage manque de fiabilité et de crédibilité, lui qui nie en bloc les faits qui lui sont reprochés. «Certaines réponses du sergent Savage sont invraisemblables alors qu’à d’autres moments, ses réponses tendent à le présenter sous le meilleur jour possible. Il n’admet aucun tort, il ne se remet aucunement en question. Il arrange à sa façon les faits, et atténue la portée des gestes et des actions qui lui sont reprochés», lit-on dans la décision.
En plus du mauvais comportement du policier lors de l’interception, la magistrate critique ce qu’il a écrit dans son rapport d’infraction, dans lequel il mentionne que le femme était «déplaisante» et «déconnectée de son environnement». Il a rapporté des bribes de leurs échanges, mais uniquement les paroles de la conductrice. «Ces écrits portent atteinte à la dignité de madame et à sa réputation, des droits enchâssés dans la Charte des droits et libertés de la personne. Les remarques (…) dénotent un manque de respect (…). Ces notes sont offensantes pour quiconque les lirait, encore plus pour la personne concernée», est d’avis le Tribunal.
Une demande à la SAAQ aux lourdes conséquences
Après la fameuse interception de janvier 2020, le policier a fait une demande à la SAAQ pour qu’elle évalue l’aptitude de conduire de la septuagénaire. Dans le formulaire de la demande, il écrit que la conductrice «n’a plus de réflexes, qu’elle n’a pas conscience de son environnement, qu’elle fait ses arrêts obligatoires au milieu de l’intersection et qu’elle ne regarde jamais dans son rétroviseur».
Il va même jusqu’à avancer qu’elle présente des problèmes de motricité, d’acuité visuelle et d’orientation spatiale et temporelle. «Il n’a pas de raisons de faire de telles déclarations avec le peu d’information qu’il détient. C’est grave. Lorsque la SAAQ reçoit une demande d’un policier, qui plus est un sergent, c’est sérieux. (…) Lorsque madame décrit le sergent Savage comme un policier intimidant et arrogant, le Tribunal la croit.»
Finalement, la juge administrative rappelle la gravité des conséquences pour la plaignante, tant sur le plan économique que sur sa santé, que ce soit par le stress, l’insomnie ou encore les cauchemars vécus jusqu’à ce qu’elle reçoive la confirmation de la SAAQ que son permis n’est pas suspendu. «C’est son autonomie qui était en jeu. Le Tribunal peine à comprendre comment une interception pour un arrêt obligatoire (…) cause autant de préjudices. Ce n’est pas par inadvertance ni par ignorance que le sergent engage madame dans un processus laborieux la forçant à démontrer qu’elle est apte à conduire (…). Il est un policier d’expérience.»
La Cour est donc venue à la conclusion que les agissements du sergent Savage constituent une inconduite et portent atteinte à son devoir de préserver la confiance et la considération requises par l’exercice de ses fonctions. À l’inverse, le policier est blanchi sur la thèse qu’il avait commis des propos injurieux, fondés sur l’âge.
Une deuxième audience aura donc lieu dans ce dossier pour entendre les représentations sur sanction. Au moment d’écrire ces lignes, aucune date n’avait encore été fixée, mais on pourrait s’attendre à un dénouement en début de 2025.
Précisons qu’à la date de l’inconduite qui lui est reprochée, Philippe Savage portait le grade de sergent de relève à la RPM, où il travaille depuis la fin des années 1990. Cependant, au moment de l’audience et de la décision, il porte le grade d’agent.