Violence conjugale : «Faut que ça cesse!»

SOCIÉTÉ. Les 18 féminicides commis au Québec depuis le début de l’année ébranlent la population. La MRC de Memphrémagog n’enregistre aucun meurtre de femmes jusqu’à maintenant, mais la crise sanitaire et le confinement ont notamment fait grimper le nombre d’actes de violence aux quatre coins du Québec, incluant dans la région.

Pas de panique au Centre des femmes de Memphrémagog (CFM), mais l’inquiétude règne à l’aube des 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes, qui se déroulera du 25 novembre jusqu’au 6 décembre. Cette dernière date correspond à la Journée de commémoration de la date d’anniversaire du meurtre de 14 jeunes femmes à l’École Polytechnique de Montréal, en 1989.

Les statistiques précises sont absentes dans la région, mais la Régie de police Memphrémagog intervient plus souvent en la matière depuis quelques années, et plus particulièrement depuis le début de la pandémie.

Une hausse semblable observée au CFM, qui réfère des cas urgents à des ressources comme SOS violence conjugale, et qui aide des victimes provenant de tous les milieux et de tous les âges.

Le portrait de la situation est difficile à cerner dans Memphrémagog, mais la violence faite aux femmes demeure une préoccupation constante au CFM. Comme ailleurs au Québec, elle peut toucher une enseignante ou une infirmière aux prises avec un conjoint qui pourrait être, par exemple, un médecin ou un avocat. Cet organisme a déjà vu des femmes retraitées quitter leur conjoint violent après trois décennies de mariage.

 

DES VIOLENCES PHYSIQUES, PSYCHOLOGIQUES, FINANCIÈRES ET SEXUELLES

Véronique Latulippe et Chantal Pinard, respectivement coordonnatrice et intervenante au CFM, rappellent que la violence conjugale prend plusieurs formes. Elle est physique, psychologique, financière, verbale et sexuelle. «Que tu sois riche ou pauvre, ça devient problématique lorsque tu te retrouves seule avec ton agresseur qui te contrôle, et qui contrôle tes fréquentations familiales et amicales», explique Mme Pinard.

«Ce n’est plus un conflit amoureux qui peut se régler en discutant lorsque le conjoint exerce du pouvoir, a toujours raison et diminue l’autre, ajoute Mme Latulippe. Ces gestes se répètent malheureusement sur de longues périodes, car la victime vit d’espoir que l’agresseur redevienne gentil et amoureux comme avant.»

« C’est anormal qu’un homme lance une sauce à spaghetti sur sa conjointe lorsqu’elle n’est pas à son goût, poursuit-elle. Il ne doit pas blâmer sa conjointe lorsque le repas est brûlé. Il ne doit pas dire que c’est de la faute de sa conjointe s’il est fâché, car c’est elle qui s’habille en guidoune.»

Quand ces situations se produisent, ce serait un bon moment de quitter cette relation toxique, ou du moins d’en parler avec le conjoint ou demander de l’aide. «La violence est un subtil cercle vicieux qui s’installe lentement, prévient Véronique Latulippe. Mais un jour, cependant, ça ira trop loin et il n’y aura plus de retour à la normale.»

Le Centre des femmes invite l’entourage de ces victimes à faire preuve de vigilance, d’être à l’écoute, d’être attentif aux changements de comportement, de les accompagner, mais, surtout, de ne pas les brusquer. «On ne peut aller plus rapidement que leur propre rythme, avise Chantal Pinard. On risque de recommencer ou de voir une victime retourner avec son ex-conjoint si on bouscule les événements. Il faut leur faire comprendre qu’il est primordial de ne pas rester seul avec cette situation et que l’aide existe.»

Mme Pinard et Latulippe insistent sur cette vigilance, car les ressources sont débordées. Les centres d’hébergement sont pleins. Jumelées à une pénurie de logements, ces lacunes limitent au plus haut point les options offertes aux femmes violentées. On leur suggère parfois d’aller vivre chez des amis ou avec des membres de leur famille, mais ce n’est pas toujours facile avec des enfants. Deux logements de dépannage existent à Magog, mais ils sont très souvent occupés par d’autres personnes dans le besoin.

Le Centre des femmes accompagne ces victimes, mais il travaille également en prévention pour sensibiliser les adolescents et adolescentes aux conséquences nocives des actes violents. Des ateliers ont été offerts ces derniers mois auprès des élèves du secondaire, plus particulièrement sur la dangerosité des sextos et des propos violents sur les réseaux sociaux. L’objectif consistait à les éveiller plus jeunes afin de freiner le cycle et la durée de la violence.

 

ACTIVITÉS DES 12 JOURS D’ACTION

Le Centre des femmes prépare quelques activités qui se dérouleront dans le cadre des «12 jours d’action contre les violences faites aux femmes», qui se dérouleront du 25 novembre au 6 décembre. L’unité mobile sera devant le parc des Braves pour informer et sensibiliser la population, le 29 novembre de midi à 14 h.

Suivront la projection du documentaire «T’as juste à porter plainte» (inscription obligatoire), le 1er décembre de 13 h 30 à 15 h 30, et un atelier-conférence sur Intimidation, le harcèlement et la manipulation de 9 h à 11 h (inscription obligatoire), le 2 décembre.

 

EN CHIFFRES

  • 41 000 demandes d’aide adressées à SOS violence conjugale au cours de la dernière année au Québec
  • Il s’agit d’une hausse de près de 24 % en un an
  • Le téléphone sonne 300 fois par jour à SOS violence conjugale
  • 18 féminicides au Québec depuis le début de 2021