TRIBUNE LIBRE: Dernier appel: sauvons notre forêt urbaine

Mon cœur pleure et se révolte à l’idée de devoir perdre notre forêt urbaine entre la rivière Magog et la rue de Hatley aux bulldozers des Berges Hatley. Seulement un miracle pourrait sauver notre forêt maintenant. Après six mois de travail acharné, on ne peut pas dire qu’on a gagné grand-chose : 16 bâtiments au lieu de 17, des rues plus courtes et une bande de forêt de 10 mètres à partir de la piste cyclable.  

On a tout fait, on a tout essayé : du porte-à-porte, des pétitions en ligne, des lettres à nos élus et aux candidats politiques, des articles et des entrevues avec les médias, des demandes d’appui aux groupes de protection environnementale et au Ministère de l’Environnement, des questions et des commentaires aux séances du conseil municipal, des pancartes d’information en forêt, une marche de manifestation en forêt, des propositions et de l’information à la ville et au promoteur pour construire autrement en forêt et un kiosque d’information aux portes ouvertes Des Berges Hatley. Mais, on n’a pas réussi de nous faire vraiment entendre ou de faire comprendre aux élus et à la population ce que la destruction de cette forêt va signifier pour la santé de Magog et de ses citoyens. 

Voyez-vous, cette forêt urbaine se trouve dans un milieu naturel exceptionnel, incluant la rivière Magog, des ruisseaux, deux marais de moyenne valeur, deux marais d’haute valeur, des tourbières ainsi qu’une grande variété d’oiseaux, des animaux et des plantes, le tout à quelques pas du centre-ville. Plusieurs experts en environnement (incluant la firme Envirosol employée par Berges Hatley) nous ont confirmé qu’il fallait laisser une bande de forêt d’autour de 75 mètres du bord de la rivière sinon la faune qui fréquente le marais va disparaître à la longue, ayant besoin d’un corridor vert assez large pour pouvoir se nourrir, se loger, s’abriter, se déplacer et migrer.  

Du commencement de notre lutte contre ce projet, on a été frappé par le manque de transparence et d’ouverture de la part de la ville et du promoteur. On a beau essayer de montrer à la ville des cas inspirants des municipalités ou villes qui trouvaient des moyens pour sauver des terrains boisés des mains des promoteurs en allant chercher des subventions des différents organismes, la réponse restait toujours négative. Non à un parc nature, non à diviser le projet en deux pour pouvoir laisser une bande de forêt convenable, non à un échange des terrains avec le promoteur. Toutes nos demandes étaient impossibles, la ville ne pouvait rien faire à part de dépenser de 5 à 15 millions de dollars pour acheter le terrain du propriétaire (Des Berges Hatley l’acheté pour moins de 900 000 $) et le promoteur avait tous les droits. Le promoteur nous a même nié accès aux études environnementales qu’ont été fait sur le terrain en 2016 et 2021, menaçant l’ancien propriétaire de le poursuivre s’il nous donnait accès. C’est sûr que ce manque de transparence nous a inquiétés davantage et nous a fait soupçonner que le promoteur avait quelque chose à cacher. 

Magog contredit son Plan d’adaptation aux changements climatiques

On ne comprend pas non plus comment la ville, en approuvant ce projet résidentiel tel quel, agit complètement contre son propre Plan d’adaptation aux changements climatiques adopté en 2020. Ce plan considère que les stratégies d’adaptation aux changements climatiques les plus efficaces et moins coûteuses pour la Ville de Magog sont la protection des milieux humides, la protection des bandes riveraines, la protection des milieux naturels et la protection de la biodiversité. Le projet Des Berges Hatley menace de détruire justement ce que le plan recommande de protéger. Le plan de la ville constate aussi que la ville de Magog a, dans son périmètre, un couvert forestier insuffisant (20%) et que pour atténuer les effets des changements climatiques il va falloir augmenter le couvert forestier a 30% (et même viser 50%) d’ici 2030. Est-ce que ça fait du sens d’approuver des développements qui réduisent encore plus le couvert forestier à l’intérieur de Magog? Combien plus cher ça va coûter aux contribuables de Magog pour végétaliser la ville au lieu de garder les espaces boisés qui existent déjà ?  

Le pire c’est qu’on est encore convaincu qu’on a raison en voulant protéger cette forêt et en demandant qu’au moins le développement soit réduit pour pouvoir laisser une bande de forêt convenable. On reste avec la conviction que la ville, en approuvant le projet Des Berges Hatley tel quel, va commettre une grave erreur pour le futur de Magog et va le regretter, mais ça va être trop tard pour revenir en arrière.