La nouvelle vie d’Admyra et de sa mère Theresa  

SOCIÉTÉ.  Theresa Philbrick et sa fille Admyra ont traversé plusieurs années difficiles en raison du rare syndrome d’Angelman dont est atteint l’enfant depuis sa naissance. Aujourd’hui âgée de 23 ans, elle a découvert la joie de vivre grâce à ses présences régulières au centre de jour des Fantastiques de Magog.

Sa mère aussi respire davantage depuis l’entrée de sa fille dans cet établissement en 2019. Elle se rappelle des graves problèmes de santé qui ont commencé dès l’âge de trois semaines. À 19 mois, les médecins ont découvert que 43% de la nourriture avalée tombait dans ses poumons!  Étouffements, vomissements, problèmes de déglutition, trouble de langage sévère et une déficience intellectuelle de moyenne à sévère ont mené au diagnostic du syndrome d’Angelman à 6 ans.

Admyra ne pouvait rester seule ni subvenir à ses propres besoins sans l’aide de personne. Elle a été en couche jusqu’à 7 ans et dormait trois à quatre heures par nuit. Elle ne pouvait se laver ni se brosser les cheveux elle-même. Les parents ont vite compris qu’elle ne pourrait jamais être autonome ni se dénicher un emploi.

Admyra ne restait pas longtemps en garderie ou les éducatrices en privé demandaient plus chère de l’heure que le taux horaire gagné par Theresa. Elle a même été victime d’attouchements sexuels dans un centre de répit, selon sa mère.

L’amour d’une mère plus fort que tout

L’amour d’une mère pour sa fille a survécu à un divorce, une faillite et beaucoup de pauvreté, car elle tenait à garder Admyra avec elle. «Je ne faisais plus confiance à personne et ma santé mentale et physique déclinait, jusqu’au jour où j’ai découvert les Fantastiques. Ce groupe a changé notre vie», confie-t-elle.

La petite famille et un nouveau conjoint habitent Magog depuis 2019, date d’entrée d’Admyra chez les Fantastiques. «Hésitante au départ, je pleurais tous les matins lorsqu’elle quittait la maison pour se rendre au centre de jour, se souvient-elle. Quelle joie aujourd’hui de la revoir heureuse à la fin de la journée et impatiente d’y retourner le lendemain.»

Theresa se souvient, comme si c’était hier, que sa fille ne parlait pas et qu’elle n’avait aucune amie. «Les Fantastiques lui ont permis de développer sa sociabilité, de communiquer avec d’autres usagers et d’articuler quelques mots, enchaîne-t-elle. C’est presque magique, car elle est plus calme et moins agressive. Nous sommes chanceux, car plusieurs familles avec des enfants avec déficience intellectuelle ne reçoivent aucune aide à partir de 18 ans.»

Theresa Philbrick profite de la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle, qui se déroule du 20 au 26 mars, pour souligner le travail des Fantastiques. Elle utilise aussi cette tribune pour demander au gouvernement de respecter son engagement de financer davantage ces services communautaires essentiels. Elle suggère également de compenser adéquatement les familles qui s’occupent de leurs enfants malades ou handicapés à la maison.

«Sans ces centres, les familles seraient dans l’obligation de placer leurs enfants dans les familles d’accueil ou vivre dans la pauvreté absolue, comme je l’ai vécue, prévient-elle. Aider davantage les centres, les usagers et leurs familles permettra d’avoir une meilleure qualité de vie. Nous serions réellement perdus sans des organismes comme les Fantastiques.»

Un manque de financement criant

La directrice générale des Fantastiques, Caroline De Francesco, endosse les propos de Theresa Philbrick en ce qui concerne l’évolution de sa fille et le manque de financement des organismes communautaires.

«On maintient les tarifs très bas, tel que désiré par notre fondatrice Constance Langlois il y a 50 ans, explique la directrice. Nous sommes parmi les pionniers au Québec, mais ce type de service va lentement mais sûrement en croissance. Nous avons cependant besoin d’aide financière pour maintenir et poursuivre nos services.»

Elle réclame des contributions du gouvernement pour aider plus que les 45 usagers actuellement inscrits au centre de jour, en plus d’offrir encore plus de répit aux parents. La liste d’attente s’allonge et le CIUSSS de l’Estrie-CHUS voit les besoins grandir.  «Il faudrait qu’on passe plus de temps pour remplir notre mission de base plutôt que de consacrer de nombreuses heures à chercher du financement et des dons, espère-t-elle. 

Malgré les apparences de bonne santé financière, Mme De Francesco confie que l’organisme conserve néanmoins un équilibre précaire. «Nous sommes financés qu’à 34% du seuil plancher qu’on derait avoir, détaille-t-elle. Une chance qu’on a des dons et la Fondation Constance-Laglois pour nous épauler.»

Du financement supplémentaire permettrait aussi de répondre à un besoin croissant dans la communauté. Il s’agit de l’absence de ressources pour les usagers devenus moins autonomes, entre les Fantastiques et le CHSLD. «On réfléchit déjà à une façon de répondre à ces gens qui ne peuvent plus rester chez nous, mais qui sont trop jeunes pour aller aux soins de longue durée», termine-t-elle.