Confidences d’une amie orferoise de Paul Rose
SOCIÉTÉ. Le 50e anniversaire de la crise d’Octobre ravive des souvenirs émotifs à l’Orferoise Louise Gagné, puisqu’elle a contribué à la remise en liberté du leader des felquistes, Paul Rose, à la fin des années 1970. Une relation amicale et intellectuelle était née. Ces liens ont duré près de 35 ans.
Louise Gagné et son conjoint de l’époque, le regretté Diemu Kalunda, se sont liés d’amitié avec le couple formé de Paul Rose et d’Andrée Bergeron. C’est le professeur universitaire Kalunda qui a d’abord enseigné à Paul Rose pendant sa détention.
Les neuf refus pour la remise en liberté de Paul Rose ont profondément irrité Louise Gagné à la fin des années 1970, même si elle ne l’avait jamais rencontré à ce moment. Elle aussi enseignante, elle propose à l’activiste un emploi similaire à son école de Montréal. Elle obtient l’accord de la majorité des parents, puis la Commission des libérations conditionnelles accepte sa remise en liberté.
«Je l’ai accueilli à notre école dès sa première sortie de prison, se rappelle-t-elle encore avec émotions. Il a même enseigné à mon fils dans cette école où, plus jeune, il avait lui-même étudié.»
Des liens serrés se sont tissés entre les deux couples. Paul Rose et sa conjointe ont séjourné à quelques reprises dans les maisons de Louise et Diemu Kalunda à Outremont et au Canton d’Orford. «Moi et sa femme, on l’empêchait de manifester, car il risquait la prison. On le protégeait de lui-même, car il voulait toujours s’impliquer. J’ai collaboré aussi beaucoup avec sa femme dans le secteur de la jeunesse.»
Au chevet de son défunt mari
Le felquiste est aussi au chevet de M. Kalunda peu de temps avant son décès. «Une disparition qui l’a troublée, car mon conjoint congolais était un grand sage et doté d’une grande ouverture d’esprit, témoigne Mme Gagné. M. Kalunda a vécu la décolonisation de son pays africain. Le discours des felquistes le rejoignait et il soutenait les actions politiques de ses élèves.»
Louise Gagné se rappelle de Paul Rose d’un homme intelligent et clairvoyant. Elle buvait ses paroles. Elle adhérait à son discours lorsqu’il affirmait que «les Québécois étaient des colons et qu’ils devaient se décoloniser».
Elle avoue toutefois avoir été troublée en apprenant le décès du ministre Pierre Laporte. Paul Rose, son frère Jacques et Francis Simard ont d’ailleurs été condamnés à perpétuité pour le meurtre de ce politicien. On a appris plus tard que Paul Rose était absent à la mort de M. Laporte. Il a toutefois toujours assumé une part de responsabilité à titre de leader du Front de libération du Québec (FLQ).
«Les felquistes ne sont pas des extrémistes»
Encore aujourd’hui, Louise Gagné ne considère par les felquistes comme des extrémistes. «Les extrémistes sont plutôt ceux qui nous empêchent de vivre, comme ceux qui ont refusé mon admission à l’Université de Sherbrooke en 1963, car j’étais une femme», se souvient-elle avec tristesse.
Mme Gagné avoue vivre ce 50e anniversaire de façon différente des autres années. Elle vivait à Montréal à l’époque et elle a vu régulièrement des militaires dans les rues, même à proximité de sa maison.
50 ans plus, elle croit que le message des felquistes a permis de sortir du brouillard bien des Québécois.
Elle était aussi bien heureuse de revoir la conjointe de Paul Rose et son fils Félix, le 16 septembre dernier à Magog, lors de la présentation du film «Les Rose».