Chronique: l’Île disparue de la Baie-de-Magog

Le lac Memphrémagog est parsemé d’îles tant du côté américain que du côté canadien. Au total, quelque 26 îles ont été répertoriées dans le passé. Selon certains anciens documents, avant d’être baptisées, chacune portait un numéro, de 1 à 26 en partant de Newport au Vermont jusqu’à Magog. De sorte que les Trois Sœurs étaient les îles 22, 23 et 24, l’actuelle île Charest portait le no. 25 et la Old Witch Island, le no. 26. Au cours des années, certaines de ces îles sont disparues pour devenir des hauts-fonds (shoals), dont l’île no.  26 dans la Baie-de-Magog.

À la suite de l’augmentation de la circulation maritime et de plusieurs enlisements de bateaux sur ces hauts-fonds, en 1878, les gouvernements américain et canadien votent des subsides pour l’installation de phares sur les deux rives du lac. Nathan A. Beach de Georgeville en construit cinq, pour le compte du gouvernement canadien, pour une somme de 975 $, dont une sur cette île no. 26, qui est alors connue sous le vocable de Old Witch Island-Shoal. Pourquoi Old Whitch (vieille sorcière)? Vraisemblablement parce qu’elle disparaissait quand le niveau de l’eau s’élevait et qu’elle réapparaissait quand le niveau baissait.

Au cours de son existence (1850-1892), le Mountain Maid est victime de quelques incidents, dont un enlisement à Whipple’s Point, du côté américain, avec passagers à bord, le samedi 28 août 1869. Le lendemain matin, le Lady of the Lake (1867-1915), en service depuis deux ans, doit intervenir pour le tirer de sa fâcheuse position. 

Près de vingt ans plus tard, le Mountain Maid aura l’occasion de lui rendre la pareille. En effet, le 11 juillet 1888, le Lady of the Lake s’enlise en arrivant à Magog. À son arrivée dans la Baie-de-Magog, avec des passagers à son bord et au cours d’une violente tempête, le Lady s’échoue sur le Old Witch Shoal-Island, cette ancienne île devenue un haut-fond à la suite de la construction du barrage Francis en 1883. Le Mountain Maid vient à son secours et évacue les passagers affolés, mais ce n’est que le dimanche suivant qu’avec l’aide de barges, il arrive à le déloger de sa fâcheuse position.

C’est précisément sur ce haut-fond que le Grand Cru, au départ de l’une de ses excursions peu de temps après sa mise à l’eau en juin 2011, s’est échoué avec à son bord près de cent passagers. Tous ont été évacués et l’excursion reportée. Même si la garde côtière canadienne y installe chaque année un phare mobile de mai à octobre, l’endroit demeure un danger pour la navigation.

Voici une section de la carte de Julian Smith (« Chart of Lake Memphremagog », 1938) qui situe le site du phare un peu au large du quai MacPherson. (Photo gracieuseté)