Anne-Marie Fournelle: portée par l’amour des enfants et une soif d’équité

PERSONNALITÉ DE L’ANNÉE. Anne-Marie Fournelle a dû faire appel à toute sa détermination, et surtout, son amour des enfants, pour mettre sur pied le Centre de pédiatrie sociale en communauté Le Tandem, en 2017 à Magog. Cinq ans plus tard, elle se félicite d’avoir gardé le cap, puisque ce sont près de 300 jeunes qui bénéficient annuellement des retombées positives de cet organisme à but non lucratif.

Basé sur l’oeuvre du Docteur Julien, le Centre le Tandem offre gratuitement des soins et services aux enfants et adolescents présentant diverses problématiques scolaires, de santé, de développement, du comportement, de communication ou autres.

Au cours de la dernière année financière, chaque enfant qui a fréquenté le centre de Magog (rue Saint-David) ou encore le point de services à Stanstead (rue Dufferin) a eu droit à une moyenne de 22 interventions de nature diverse: ergothérapie, aide aux devoirs, services psychoéducatifs et sociaux, soins médicaux, etc.

Certains d’entre eux ont aussi pris part à des initiatives comme des projets intergénérationnels (avec les aînés) ou le Jardin Jeunes Entrepreneurs.

Tout ça, sans débourser un seul sou. « Tous les services qu’on offre ici sont gratuits… même les collations. Ce ne sont pas tous les parents qui ont les moyens de s’offrir des séances privées avec un ergothérapeute. Plusieurs ont déjà de la difficulté à payer leur épicerie, alors on s’assure qu’ils aient droit aux mêmes services que les autres », fait valoir la directrice générale du Tandem, Anne-Marie Fournelle.

Des inégalités qui dérangent

Cette soif d’équité, Mme Fournelle la ressent depuis son jeune âge. Issue d’un milieu aisé, elle a toujours été « inconfortable » avec le fait que d’autres enfants vivaient dans des conditions plus misérables. « Je ne comprenais pas pourquoi moi j’étais venue au monde sur l’Avenue des Diamants, alors que d’autres habitaient sur l’Avenue des Tuyaux », image-t-elle.

Psychoéducatrice de formation et forte d’une carrière de plus de 30 ans dans le réseau de la santé en Estrie, Anne-Marie Fournelle constate que plusieurs enfants de la région sont en situation de vulnérabilité et pourraient profiter de la pédiatrie sociale en communauté, un concept mis sur pied par le Docteur Gilles Julien. Cette approche vise à offrir des services gratuits aux jeunes de 0-17 ans, afin de les aider dans leur développement global, tout en les mettant au cœur de l’action.

« J’ai travaillé dans plusieurs secteurs (services sociaux, centres d’accueil, santé mentale), mais j’ai toujours trouvé que le réseau traditionnel avait des contraintes qui n’aidaient pas l’enfant à se développer à sa juste valeur. Et surtout, je concevais mal que l’enfant ne soit pas mis au centre des priorités. Quand on prépare un plan d’intervention pour un jeune, il faudrait qu’il soit présent pour qu’il sache ce qu’on attend de lui, et non prendre des décisions dans son dos », plaide-t-elle.

Forte opposition

Profitant d’un congé en raison d’un traitement différé, Anne-Marie Fournelle lance les bases du Centre Le Tandem en 2017. Bénéficiant de l’appui financier de sa famille – qui a maintes fois contribué à l’œuvre du Dr. Julien – elle se heurte toutefois à une forte opposition du milieu communautaire magogois, qui semble la percevoir comme une menace pour les services déjà existants.

« Lorsque j’ai présenté le projet, ce fut un refus global. Un comité d’opposition a même été formé pour stopper mes démarches. Ce fut une étape très difficile », avoue-t-elle.

« La seule réponse favorable que j’ai reçue provenait de la Commission scolaire Eastern Townships », tient-elle à préciser.

Convaincue de la légitimité de sa mission et armée d’une énergie contagieuse, Mme Fournelle s’attaque à faire tomber les préjugés et dénicher des appuis, un à la fois. « J’ai réussi à former une petite équipe et nous avons finalement ouvert nos portes le 2 octobre 2017. Cette journée était la date prévue pour mon retour au travail. À la place, j’ai remis ma démission à la Santé publique et je suis plongée tête première dans l’aventure du Tandem », se remémore-t-elle.

Elle travaille bénévolement

N’ayant jamais dirigé de personnel, Anne-Marie Fournelle s’octroie tout de même le poste de directrice générale du Centre Le Tandem, étant l’instigatrice du projet et sans doute la personne la plus familière avec tous les dossiers. 

« Je n’avais rien d’une directrice, mais j’avais la détermination, la vision et je croyais en la vie. Pour le reste, je me suis entourée de gens formidables qui réalisent des miracles au quotidien pour les enfants », louange cette dynamo humaine.

La « patronne » du Tandem pousse même l’implication jusqu’à occuper bénévolement son poste, une formule qu’elle maintient depuis les débuts. « Même si je ne me verse pas de salaire, j’y mets toutes mes énergies et c’est un bonheur de venir travailler ici chaque matin. Ce qui m’importe, c’est qu’on puisse aider le plus grand nombre d’enfants possible », fait valoir celle qui a elle-même adopté deux enfants il y a une vingtaine d’années.

Maintenant que Le Tandem a pris sa vitesse de croisière, sa directrice veut s’attaquer au rayonnement de l’organisme et recruter de nouveaux partenaires. « On souhaite que les entreprises de Magog et des environs nous soutiennent encore davantage, parce qu’on va continuer de grandir. Les dons philanthropiques sont nécessaires à notre fonctionnement », plaide Anne-Marie Fournelle, en ajoutant que le secteur public contribuait pour seulement un tiers du budget de financement.

« Après cinq ans d’existence, on peut dire que les doutes sont dissipés et que notre crédibilité est établie dans la communauté », se réjouit-elle. 

Pour en apprendre davantage sur le Tandem: letandem.org