Le suicide de Karine Dion, un drame qui secoue le Québec

COVID-19. La fin tragique de l’urgentologue Karine Dion a créé une onde de choc en Estrie et partout au Québec. Épuisée de la lutte à la COVID-19, la femme originaire de Magog pratiquant la médecine depuis 10 ans à Granby s’est enlevée la vie au début du mois. Un drame qui a trouvé écho chez le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, et ailleurs.

«Une histoire à crever le cœur. Toutes mes condoléances aux proches de la Dre Dion, en particulier à son conjoint et ses enfants. À tous ceux qui traversent des moments difficiles: n’hésitez surtout pas à demander de l’aide», recommande Christian Dubé.

Un drame qui n’est pas étranger à «l’incroyable pression que vivent les employés du réseau de la santé», ajoute le Collège des médecins dans les médias sociaux.
«Cela reflète malheureusement ce qui se passe sur le terrain», acquiesce Gilbert Boucher de l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec. «Les gens sont à bout. Ils manquent de sommeil, il y a beaucoup de stress dans le milieu de la santé. Ça fait 10 mois qu’on est là-dedans», explique le président en reconnaissant que les médecins ont souvent de la difficulté à mettre un genou au sol pour demander de l’aide psychologique. «C’est un milieu difficile. On prend souvent des décisions importantes. On nous demande la perfection. D’avouer qu’on est plus capable c’est encore tabou».
De son côté, Judy Morris de l’Association des médecins d’urgence du Québec indique que les médecins d’urgence sont dans les professions les plus à risque au suicide en temps «normal». «Avec la COVID, l’insécurité face à soi et la possibilité de contaminer sa famille a ajouté au stress qui était déjà là. On s’en met beaucoup sur les épaules. Il ne faut pas se voir en super héros et aller chercher l’aide», implore aussi Judy Morris.

Un triste événement qui ébranle la communauté médicale

Au plan régional, le président Jacques Bergeron de l’Association des médecins omnipraticiens d’Yamaska s’est dit ébranlé et d’une grande tristesse face à cet événement qui ébranle l’ensemble de la communauté médicale. «La pandémie actuelle ajoute un grand stress et un accroissement de la charge mentale chez nos membres. Nous invitons les médecins et tout le personnel médical à consulter au besoin. Personne n’est à l’abri. Bien que, comme médecins, nous soyons dédiés à guérir, soulager et réconforter nos patients, il importe parfois de prendre le temps de nous observer nous-même, ainsi que nos collègues», précise le médecin de famille de Granby.

Le CIUSSS de l’Estrie – CHUS a également réagi. «C’est avec grande tristesse que nous avons appris le décès de Dre Dion. Nous offrons nos sincères sympathies à sa famille et à ses proches. Dre Dion a su toucher collègues et amis par son engagement et la rigueur de son travail. Empathique, elle mettait ses patients et leur famille au centre de son approche. Elle incarnait véritablement notre valeur d’humanisme», rappelle Félix Massé, conseiller en communication de l’organisation qui invite les équipes touchées et, plus généralement, les membres du personnel à recourir aux ressources d’aide comme le Programme d’aide aux médecins du Québec (PAMQ) et le Programme d’aide aux employés du CIUSSS de l’Estrie – CHUS.

Son conjoint David Daigle se confie

Bien que toujours affecté par le départ de sa conjointe Karine Dion, David Daigle a tenu à remercier l’équipe de l’hôpital de Granby qui a mis en place une campagne de financement afin de créer une bourse d’études pour leur fils Jacob.

«Ça me touche beaucoup. Les études étaient très importantes pour Karine. Je sais que cela lui tenait à cœur et qu’elle ne voulait pas que son fils s’endette comme elle avait dû le faire», témoigne David Daigle tout en exprimant sa gratitude à toutes les personnes ayant fait un don sur la page GoFundMe créée par les collègues de l’urgentologue qui s’est enlevée la vie en début d’année.

«Notre communauté ainsi que la famille de Karine Dion est en deuil après le décès beaucoup trop rapide de notre collègue et amie. Nous soutenons la famille de toutes les façons possible, une d’entre elles étant cette levée de fond pour créer une bourse d’études pour son fils adoré. Tous les montants perçus ici lui seront remis», indique-t-on sur la page qui, à ce jour, a permis d’amasser plus de 30 000 $.

David Daigle a par ailleurs invité toute la population à prendre des nouvelles des gens qui travaillent dans le système de santé. «Quand une personne ne va pas bien, ça ne coûte rien de lui téléphoner et de lui donner des mots d’encouragement. Il faut leur dire qu’on pense à eux et qu’on est là pour eux», demande-t-il tout en implorant les Québécois à respecter les consignes sanitaires liées à la prévention de la COVID-19.
«Les travailleurs de la santé en ont plus sur le dos qu’ils en sont capables. Faut faire attention à nos travailleurs essentiels», conclut le père du petit Jacob.

Les gens peuvent donner au www.gofundme.com en tapant Karine Dion.