IMMIGRATION: Armin Ruf file le parfait bonheur depuis 55 ans à Stanstead

Ce coloré personnage est arrivé au Québec en 1965 à l’âge de 13 ans, avec ses parents et ses deux frères. Son père Josef avait été prisonnier de guerre en France pendant quatre ans. Il parlait un peu la langue de Molière et désirait quitter l’Allemagne pour éviter notamment à ses fils le service militaire obligatoire dans ce pays.

Josef a préféré le relief estrien aux plaines montérégiennes. Ce fut sûrement un bon choix, car la famille habite toujours au même endroit sur une propriété élargie et avec une quatrième génération qui pousse. L’un des quatre arrière-petits-fils du pionnier s’appelle d’ailleurs Josef (12 ans).

Armin Ruf se rappelle de son intégration qu’il considère comme une réussite et une grande fierté aujourd’hui, même s’il ne parlait pas anglais ni français au départ. «L’école n’était pas ma force, mais j’aimais travailler dans les champs dès notre arrivée, témoigne cet homme de 68 ans. Mais à force de rencontrer des gens, de s’impliquer dans la communauté, de chanter dans la chorale et de commercer, on arrive à se faire comprendre.»

M. Ruf a pris la relève du paternel bien avant le décès de celui-ci à l’âge de 84 ans – sa mère Walburga est décédée à 64 ans. Il a acheté des terres voisines pour atteindre le millier d’acres. Il a déjà eu 100 vaches laitières, ce qui représentait une importante exploitation agricole à cette époque. «Ce furent de bons moments, mais l’agriculture a perdu son cachet familial aujourd’hui, malheureusement», s’attriste-t-il.

De beaux souvenirs certes, mais aussi de douloureux avec la maladie qui l’a considérablement ralenti en raison d’un éreintant travail. «J’ai dû réduire mes activités à cause de la polyarthrite rhumatoïde à 44 ans, dont l’abandon des vaches laitières. J’ai vendu des terres et j’en ai cédé à la famille. Aujourd’hui, on cultive et on fait le commerce du foin. Je vends aussi des remorques de cheval et mon fils fait de la réparation mécanique», résume celui qui a retrouvé la santé et sa verve légendaire.

Armin Ruf ne regrette aucunement son immigration au Canada. Son patelin natal demeure néanmoins dans son cœur, ayant notamment marié Ursula en 1978, une Allemande rencontrée à Granby. Des membres de sa famille y habitent toujours. L’Allemagne figure parmi ses nombreuses destinations de voyage. Il a d’ailleurs réalisé un rêve de jeunesse en 2019 à participant au célèbre Oktoberfest de Munich.

Ayant deux enfants et quatre petits-enfants, la famille représente aussi une valeur importante pour lui. «La terre restera entre nos mains, car on ne cède pas nos propriétés chez nous, confie-t-il. Mes parents sont d’ailleurs enterrés dans notre cimetière familial.»

Réussir à s’intégrer dans la communauté représente sa plus grande fierté. Il se considère Canadien, Québécois, Estrien et Stansteadois, malgré sa naissance en Bavière. «Ici, c’est chez moi, ma maison, ma terre d’accueil. Que voulez-vous de plus?»

Photo prise au premier Noël de la famille Ruf en 1965. Armin Ruff est debout à gauche.