Tribune libre: le prix du passé

On lit de plus en plus de lettres qui traitent de conservation de bâtiments ancestraux. Je cite en exemple la petite église au bas de la rue des Pins et plus récemment la petite maison blanche d’Orford.

Comprenez-moi bien, je ne suis pas contre la conservation, la rénovation, mettre en valeur, mais tout ça coûte des sous. Et les sous dans une Municipalité, ils proviennent d’une source unique: vous, les citoyens. En effet, l’administration d’une Municipalité accumule des sommes sous forme de taxes et elle les redistribue pour le bien commun. Mais ça ne pousse pas encore dans les arbres.

Moi je veux bien tout garder sous prétexte que ça me rappelle mes jeunes années, mais je ne peux pas vivre trop longtemps dans le passé, le présent est ici et le futur s’en vient. Et que j’aime ce qui se prépare ou non, c’est bien dommage, c’est là qu’on s’en va. L’avenir appartient à ceux qui s’adaptent. Et tous ces bâtiments, ils nous rappellent le passé, mais ils ne nous font pas avancer, ils ne rapportent rien et n’ont aucune chance de rapporter quoi que ce soit autrement que des mémoires. Ils sont tous en manque d’amour et ils sont généralement érigés sur les plus beaux terrains, car ils sont tous près du centre.

Bien sûr je ne désire pas la rue Sainte-Catherine à Magog ni à Orford, mais je ne suis pas contre le progrès et si on ne s’en occupe pas nous-mêmes, eh bien quelqu’un d’autre le fera à notre place.   La petite maison blanche, désolé, mais un jour elle tombera, peut-être pas de mon temps, mais elle tombera. Inévitable. Et entre-temps, c’est vous qui défrayez la note. Elle est trop petite pour faire quoi que ce soit et il y en a des dizaines autour qui y ressemblent. Y en a-t-il qui vont la visiter souvent? Essentiellement, il est plus rentable de décider ou de négocier pour ce qui la remplacera que de faire pression pour la conserver. Ainsi vous participerez au futur.

À Magog, des églises on en a suffisamment. Tellement que la plupart d’entre elles croulent sous les dettes par manque de paroissiens aux poches profondes. L’entretien souffre et tôt ou tard…je vous laisse présager par vous-même. Sur la rue des Pins, on y boude un des seuls projets soutenables. Les options ne sont pas nombreuses. Vous avez trop de doigts sur une main pour les compter. Sans ça, vous allez la payer en taxes. Inévitable. En passant, y en a-t-il qui vont la visiter souvent?  Prendre un «selfie» en avant?

Mais si vous y tenez tellement, venez en grand nombre et donnez généreusement, car ça coûte cher le passé, encore plus que vous ne croyez.

 

Marc Delisle

Magog