Vivre avec la sclérose en plaques à 35 ans

TÉMOIGNAGE. Grande sportive et adepte de sensations fortes, Mélanie Demers a toujours vécu à 100 milles à l’heure. Mais depuis trois ans, le simple fait de marcher et de se tenir debout exige beaucoup de travail et d’énergie, elle qui doit vivre avec la «sale maladie invisible» qu’est la sclérose en plaques.

Tout a commencé en mai 2016, lorsqu’elle s’est réveillée en étant incapable de voir avec son œil droit. À part quelques maux de tête dans les jours précédents, elle se sentait pourtant en pleine forme, comme d’habitude, débordante d’énergie et prête à partir pour l’aventure. Ainsi, jamais elle ne s’était imaginé que ce symptôme était la première d’une série de manifestations de la sclérose en plaques.

«Le diagnostic, ce fut une claque en plein visage», raconte la femme, qui doit depuis porter des lunettes de soleil à l’extérieur pour supporter la lumière du jour.

«Au début, c’était surtout de la fatigue. Mais après deux ans, j’ai ressenti mes premières douleurs physiques et du jour au lendemain, je n’étais plus capable de marcher. Ma jambe gauche a complètement lâché. Disons que ça fesse, surtout pour une fille comme moi qui, l’été d’avant, venait de monter 30 montagnes aux États-Unis», se souvient-elle.

Depuis l’annonce du diagnostic, la Magogoise a entrepris un travail à temps plein au Centre de réadaptation de l’Estrie. Après avoir passé dix ans à soigner les patients comme infirmière, elle s’est donc retrouvée dans le rôle opposé.

D’ailleurs, c’est la deuxième fois que ces professionnels «lui redonnent la vie» puisqu’à l’âge de 16 ans, elle a été victime d’un grave accident de voiture. «Mon type de sclérose me permet de récupérer en partie ce que je perds, lorsque je subis une attaque dans mon corps», explique-t-elle.

«En trois ans, j’en ai eu trois: à l’œil, à la main et à la jambe. Et chaque poussée me cause un déficit physique permanent. D’autant plus que c’est dégénératif comme maladie. Chaque cas est différent, mais dans les prochaines années, il y a de bonnes chances que je me retrouve en fauteuil roulant. Je ne sais juste pas quand», confie-t-elle.

 

Une liberté sur deux roues

Évidemment, avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête, Mélanie Demers sait que le temps est compté. Du moins, le temps de qualité. Elle se décrit comme une personne qui a toujours mordu dans la vie. Ce qui est différent, aujourd’hui, c’est qu’elle doit le faire plus sagement, en acceptant ses limites.

Ainsi, pour se donner les moyens de renouer avec le plein air et l’activité physique, elle s’est offert ce printemps un vélo de montagne électrique. Un moyen de transport qui lui permet de retourner jouer dehors, tout en épargnant son corps. «Je suis en amour raide avec mon vélo, même si ç’a coûté le prix de mon char!», lance-t-elle, en éclatant de rire. «Quand t’as un «deadline», c’est lourd à porter, car t’as juste ça en tête, poursuit-elle. Au moindre signe anormal de ton corps, tu penses au pire. Tu te vois en fauteuil roulant. La seule façon de se calmer les nerfs, c’est de se changer les idées et pour moi, ç’a été de me remettre aux sports qui m’ont toujours fait triper.»

D’ailleurs, l’hiver dernier, la principale intéressée a renoué avec sa grande passion, celle de la planche à neige. Évidemment, ses journées de glisse au Mont-Orford se résumaient bien souvent à une seule descente, mais ce fut suffisant pour la faire sourire. «Quand j’ai fait ma première descente, je pleurais de joie, tellement j’étais fière de moi. Je trouvais ça dur de repartir, en voyant les conditions parfaites et mes amis continuer. Je dirais même que ça me faisait de la peine en maudit, car avant, j’aurais été la dernière partie. Mais il faut «focusser» sur le positif et savourer ces instants de bonheur», se répète-t-elle constamment.

 

Un handicap invisible

Avec une santé en montagnes russes, Mélanie Demers vit aussi des journées très difficiles. Parfois, elle peut être clouée au lit plusieurs jours consécutifs, épuisée au moindre effort. Lorsqu’elle reprend du mieux, elle doit faire ses tâches comme monsieur et madame Tout-le-monde. Ce qui signifie, notamment, d’aller à l’épicerie et parfois, être confrontée au jugement des autres.

«Quand les gens voient une voiture sport, avec un vélo dessus, se stationner dans une place pour handicapé, ce n’est pas long qu’ils me dévisagent. Ils ne comprennent pas que ma vignette, j’en ai besoin. C’est tellement lourd de devoir me justifier chaque fois à des inconnus. Oui, j’ai l’air jeune et je m’habille en sport, mais câline, laissez-moi tranquille. J’ai de la misère à faire mon épicerie!», dit-elle.

 

Le défi d’un «coming out»

Les 24 et 25 août prochain, Mélanie Demers repoussera ses limites comme elle ne l’a jamais fait depuis longtemps. Elle participera au VéloTour SP, un événement-bénéfice durant lequel elle tentera de parcourir 150 km en deux jours. «Après tout ce temps à me sentir perdue, sans projet, je me reconnais enfin. De partir à ne plus être capable de marcher, il y a un an et demi, à aujourd’hui m’entraîner pour un défi aussi fou, eh boy! C’est bien moi ça!», lance-t-elle.

Son inscription s’est faite par hasard puisqu’elle a gagné un concours qui lui permet de participer, toutes dépenses payées. Toutefois, un cadeau qui venait aussi avec une condition qui aura eu un impact majeur sur sa vie. «Chaque participant doit amasser 400 $ pour la recherche sur la maladie. Non seulement je n’aime pas trop ça quêter de l’argent, mais peu de gens savaient que j’étais malade», soutient Mme Demers.

«J’ai tellement mal pris la nouvelle que j’en parlais très peu. Mais là, pour solliciter des dons, j’ai dû faire mon «coming out». La vague d’amour a été incroyable et ça m’a fait beaucoup de bien, car j’étais tannée de le cacher», conclut-elle.

Il est possible de lui faire un don à mssoc.convio.net ou de suivre ses aventures sur Instagram (mell.mountain).