Tribune libre: mieux positionner le Québec en Nouvelle-Angleterre

Dans la foulée des propos particulièrement rafraîchissants de l’actuel premier ministre du Québec François Legault concernant la stratégie d’expansion économique hors Québec, il m’apparaît fondamental de refaire nos devoirs en ce qui concerne le premier marché d’exportation pour le Québec, c’est-à-dire, la Nouvelle-Angleterre.

Il faut souhaiter qu’en parallèle aux efforts de redéploiement d’une stratégie internationale québécoise hors États-Unis et plus axée sur l’économie et les investissements que le Québec se dote aussi d’une vraie politique de développement économique intégrée mettant en valeur la Nouvelle-Angleterre comme principale porte d’entrée du Québec aux États-Unis.  Le salut de nos PME sur les marchés internationaux dépend et dépendra encore longtemps de nos efforts avec cette région pour la simple raison économique qui veut que développer des efforts à l’exportation pour nos PME dans ce marché leur coûte moins cher et rapporte plus rapidement. 

En 2016, avec seulement 4,6 % de la population américaine et 5,4 % du PIB du pays, la Nouvelle-Angleterre représentait 14,8 % des échanges de biens entre le Québec et les États-Unis, et correspondait à 7,8 % des échanges internationaux de biens du Québec.

Au cours des cinq dernières années (2012-2016), les échanges commerciaux entre le Québec et la Nouvelle-Angleterre ont connu une croissance continue jusqu’en 2015. Malheureusement la valeur des échanges a diminué en 2016 par rapport à 2014 et à 2015, mais somme toute, la croissance annuelle moyenne de ces derniers a été positive (+3,5 %) au cours de la période considérée.  Cette diminution est pour moi inacceptable et doit être contrée par une stratégie mieux concertée des acteurs québécois du développement économique et surtout, des consultants qui se spécialisent dans ce marché.

Le solde des échanges commerciaux de biens entre le Québec et la Nouvelle-Angleterre était excédentaire au cours de la période entière (2012‑2016). En 2016, cet excédent se chiffrait à 4,4 G$, comparativement à 5,4 G$ en 2015.  Ceci est fondamental pour les PME du Québec et il faut en prendre grand soin.  On ne peut accepter une telle baisse, me semble-t-il, d’autant que la croissance de l’économie américaine aurait dû nous favoriser même à cette époque.

Le Québec vend plus en Nouvelle-Angleterre (14,1%) que dans tous les pays européens et de la CEI réunis (9,7%).  Ne serait-ce qu’avec le Massachusetts, le Ministère de l’Économie de la science et de l’Innovation du Québec mentionne aussi qu’en 2014, les échanges commerciaux de biens entre le Québec et l’État du Massachusetts s’élevaient à 3,0 G$, ce qui représente une augmentation de 17,3 % par rapport à l’année 2013. Cette hausse était attribuable à la croissance à la fois des exportations du Québec vers le Massachusetts (+21,4 % ou 301 M$) et des importations québécoises en provenance de cet État (+12,2 % ou 136 M$). Au cours de la période considérée (2010-2014), la croissance annuelle moyenne de la valeur des échanges a été positive (+9,7 %). En 2014, le Massachusetts s’est classé au 10e rang des partenaires commerciaux du Québec parmi les États américains, se positionnant ainsi entre le Connecticut (9e) et l’Illinois (11e)[i].

Je suis d’avis qu’une priorité d’actions à caractère économique, bien plus que seulement culturelle, devrait aussi être entreprise avec les acteurs franco-américains de la Nouvelle-Angleterre qui comptent encore aujourd’hui plus de 1,6 million de personnes.  Cet effort strictement stratégique pourrait grandement servir les intérêts des entrepreneurs québécois tout en favorisant la visibilité des entrepreneurs québécois déjà installés en Nouvelle-Angleterre qui pourraient ainsi devenir des ambassadeurs de la stratégie de pénétration du Québec vers le Nord-Est des États-Unis.

Comme le concept de stratégie de commerce de proximité, il n’y aura jamais rien de plus pertinent ni de plus rentable que de profiter d’une manne à moins de cinq heures de route de chez-nous et ce malgré tout ce que vous pouvez craindre d’une politique ou d’une autre émanant d’un Washington en constante ébullition.

 

Pierre Harvey

Président, Harvey International

Sherbrooke


[i] Source statistiques : Notes abrégés sur le commerce Québec-Nouvelle-Angleterre, Ministère de l’economie, de la science et de l’innovation, 2 août 2017