La petite histoire des écoles de rang au Canton de Magog

Pendant plus de cent ans, l’école de rang a fait partie du paysage québécois. Cette institution populaire, qui a remplacé l’instituteur ambulant, a commencé dans la première moitié du 19e siècle et a pris fin au début des années 1960. Le Département de l’instruction publique a fait place à un ministère de l’Éducation et un système d’enseignement mieux structuré. La présence de l’école de rang pendant 135 ans s’est inscrite dans la mémoire collective des Québécois.

Le Canton de Magog n’a pas échappé à ce phénomène, avec plus de 16 écoles rurales sur son territoire encore dans les années 1930. L’école de rang prenait souvent le nom d’un commissaire qui l’administrait, tant chez les anglophones que chez les francophones. Au rôle d’évaluation du Canton de Magog en 1931, on dénombre  encore neuf écoles rurales catholiques et sept écoles protestantes parsemées à travers le canton.

Les écoles catholiques étaient : l’école Gaudreau, sur le chemin d’Ayer’s Cliff; O’Malley, ch. de Georgeville; NorWest, ch. de Fitch Bay; Bunker Hill, ch. Bunker; Leroux, ch. d’East Bolton; Hamel, ch. de Sherbrooke; Lacaille, ch. de la Rivière;  Crossing, ch. d’Eastman, et Michigan, ch. des Caya (aujourd’hui Nicolas Viel).

Les écoles protestantes: l’école Currier, ch. des Pères; McDermott, ch. d’Eastman; les écoles Oliver et Ives, ch. de Georgeville; Tryon, ch. de Fitch Bay; Brown, ch. de Cherry River, et  Bachelder, ch. Gendron.

Il s’agissait d’édifices de clin de bois, construits en milieu rural, où seul l’enseignement élémentaire était offert. La majorité des écoles ne comptaient qu’une seule salle de classe, un vestiaire, un hangar à bois et des latrines, parfois séparées du bâtiment principal. Même si les écoles étaient construites dans des endroits stratégiques, souvent au milieu du rang, les enfants devaient parfois parcourir quelques kilomètres à pieds pour s’y rendre. Il y avait souvent une croix de chemin à proximité de l’école, et il était souvent demandé à l’institutrice d’aller y faire une neuvaine ou prier avec ses élèves «quand ça allait mal dans la paroisse».

Une seule institutrice y enseignait de deux à six classes. Elle devait enseigner la lecture, l’écriture, les principes de la grammaire française, l’arithmétique, l’histoire sainte, l’histoire abrégée du Canada, la géographie et l’explication du catéchisme à ceux qui feraient leur première communion cette année-là.

De plus, elle était responsable de l’entretien, tel le chauffage du poêle à bois, en général à deux ponts, le ménage, le déneigement. Elle devait aussi puiser l’eau d’un puits pour satisfaire ses besoins et ceux des élèves. Elle pouvait loger chez un cultivateur à proximité ou, en  certains endroits et à une certaine époque, elle habitait à école.  En 1900, le salaire moyen d’une institutrice était de 105 $ par année. Au début des années 1940, il avait presque triplé, mais le poste d’enseignante demeurait quand même mal rémunéré.

Périodiquement, l’institutrice recevait l’inspecteur d’école qui venait vérifier la qualité de l’enseignement, en questionnant les élèves. Le curé de la paroisse la visitait à l’occasion pour s’assurer que l’enseignement religieux était conforme aux normes établies. Elle recevait aussi les parents qui le désiraient pour discuter des progrès ou des difficultés de leurs enfants.

Ces écoles ont progressivement disparu de notre paysage. Certaines ont été démolies, d’autres ont été converties en résidences, dont quelques-unes sur notre territoire. En 1964, la sanction du projet de loi 60, créant officiellement le ministère de l’Éducation du Québec, sonnait le glas de la fin des écoles de rang encore en fonction.

Tant de connaissances et de valeurs ont été transmises par ces institutions, qu’il nous faut reconnaître qu’elles ont joué un rôle important dans le développement de plusieurs générations de Québécois.

 

Maurice Langlois