Îlot Tourigny : un projet à revoir

Le projet présenté par le groupe d’investisseurs de Gilles Bélanger implique la destruction de la maison Tourigny, une maison de haute valeur patrimoniale acquise par la Ville en 2003. L’édifice Sutton, voisin, acquis également par la Ville en 2004, serait lui aussi démoli. Ces édifices devaient faire place à la nouvelle bibliothèque, mais le débat sur leur éventuelle disparition n’a pas vraiment eu lieu, car en 2008, il a été décidé d’aménager la nouvelle bibliothèque dans l’ancienne église Sainte-Marguerite.

À ce moment, il n’était nullement question d’un quartier des Technologies de l’information et des communications (TIC) dans le secteur de l’Îlot Tourigny. On en parlait à peine et, lorsqu’il en était question, on parlait plutôt d’une implantation dans l’ancien complexe textile. Le discours a commencé à changer avec l’arrivée de Boréalis dans l’édifice Sutton, puis son déménagement dans l’ancien édifice de la SAQ. À cela, il faut ajouter la réflexion des dernières années sur la dynamisation du centre-ville : pour contrer les hauts cycles des périodes touristiques hivernale et estivale, l’apport de consommateurs réguliers représenterait un atout indiscutable. De ce point de vue, l’arrivée d’entreprises d’un secteur comme les TIC apparait prometteuse – en plus des multiples retombées économiques de l’arrivée de nouvelles familles.

Mais pourquoi raser la propriété Tourigny-Laforest? Pourquoi ne pas prendre les moyens pour occuper d’abord le terrain voisin de l’édifice Boréalis? Pourquoi ne pas tenter d’échanger, sous une forme ou une autre, l’édifice du commerce Roy Radio TV contre l’édifice Sutton – ce qui procurerait dès aujourd’hui à la Ville un accès additionnel direct à la maison Merry (avec la démolition d’un édifice qui, lui, n’a aucune valeur patrimoniale)? Pourquoi, ne pas favoriser la construction d’un ou plusieurs édifices sur les terrains de l’ancien dépanneur fermé (face à l’Îlot Tourigny) et de l’ancienne Coopérative agricole, en direction de la Place du Moulinier? Ou même, si on voulait faire un coup d’éclat, pourquoi ne pas envisager la construction d’un édifice phare audacieux sur le terrain vacant à l’intersection des rues Principale Ouest et Sherbrooke, de biais avec l’Hôtel de ville? Pourquoi ne pas désengorger certains services municipaux en les installant dans la maison Tourigny et récupérer des espaces de stationnement autour de l’hôtel de ville?

On peut comprendre que le temps presse parce que de nouvelles entreprises ont besoin d’espace à court terme et qu’il faut profiter des efforts de Magog Technopole pour en convaincre d’autres de venir s’y ajouter. On peut comprendre que la reconversion de l’ancien complexe textile impose des délais de plusieurs ordres et que ce site ne peut pas répondre aux besoins immédiats. Toutefois, d’autres avenues méritent d’être rapidement explorées pour ne pas affecter un immeuble patrimonial qui ne reviendra pas une fois rasé.

De plus, si on démolit la propriété Tourigny-Laforest et que, comme mentionné lors de la soirée d’information du 22 septembre dernier, on modifie le plan d’urbanisme pour retirer le caractère patrimonial de l’entrée ouest de la ville jusqu’à la rue Merry Nord, rien ne pourrait vraisemblablement plus empêcher la démolition des autres beaux édifices contigus à l’Îlot Tourigny. Ce serait une très grave erreur et il y a encore moyen de faire les choses autrement.

 

Daniel Faucher

Ex-Magogois