Une demande en mariage après 3000 courriels

AMOUR. Même s’il ne l’avait vue qu’une quinzaine de minutes deux ans plus tôt, Patrice Poulin a osé demandé la main de sa future épouse via Internet, et ce, après avoir échangé avec elle pas moins de 3000 courriels. Et il ne l’a jamais regretté.

Pour la première fois depuis belle lurette, M. Poulin passera la journée du 14 février loin de son épouse Ana Silverio, qui profite de quelques semaines de vacances à Cuba, dans son pays d’origine. Le Magogois ne se formalise pas outre mesure de cette absence, puisque dans son esprit «nous vivons la Saint-Valentin chaque jour depuis le début de notre relation».

Et l’homme de 57 ans aurait pu ajouter que, depuis 2006, cette relation lui aura valu son lot de péripéties.

Il y aura bientôt 10 ans, Patrice Poulin a vécu sa première rencontre avec une jeune femme d’une vingtaine d’années lors d’un voyage à Cuba, avec des membres de sa famille.

Il était loin de se douter qu’un simple échange d’adresses courriel allait mener à une relation amoureuse, quelques années plus tard. «Elle était serveuse dans un complexe de Holguin, où nous logions, et elle m’avait demandé de lui envoyer une photo que j’avais prise à ce moment. Aucun de nous n’avait l’intention d’aller plus loin à cette époque. Je lui avais même dit qu’elle ressemblait à ma fille et qu’elles avaient toutes les deux sensiblement le même âge», a raconté M. Poulin.

Le premier courriel, envoyé de façon banale quelques mois plus tard, a donné lieu à une série de correspondances plus régulière.

De fil en aiguille, leurs milliers d’échanges à distance se sont transformés en complicité virtuelle et amoureuse. «Nous communiquions sur Internet et j’ai décidé de la demander en mariage en avril 2008… à 2 heures du matin! Malgré sa surprise, elle a dit oui tout de suite», se rappelle-t-il avec bonheur.

Une fois la grande demande acceptée, le «jeune» tourtereau s’est empressé de prendre la route de Cuba pour passer quelques jours avec sa future épouse. «On a appris à se connaître par Internet, mais il fallait voir si ça allait fonctionner sur le terrain. Lorsque nous nous sommes revus, le coup de foudre s’est confirmé entre nous deux».

L’amour n’a pas d’âge

Alors qu’il était à l’aube de la cinquantaine et déjà père de deux enfants d’âge adulte, nés d’une précédente union, Patrice Poulin s’est engagé dans une voie qui en a fait sourciller plus d’un.

Et le principal intéressé reconnaît que sa relation a beaucoup fait jaser. «Au départ, ma famille n’était pas très à l’aise avec la situation. Et je comprends tout ça, puisqu’en plus d’être d’origines différentes, nous avions 25 ans d’écart. Mais, je reste convaincu que l’amour n’a pas d’âge», affirme cet homme passionné.

Bien au fait que de nombreuses relations interculturelles se soient avérées cauchemardesques, M. Poulin assure avoir toujours été en confiance dans toute cette aventure. «En aucun temps, je n’ai senti de manipulation de la part d’Ana ou de ses proches. D’ailleurs, elle n’avait jamais manifesté son intention de quitter son pays. Elle aime beaucoup Cuba et sa famille est très bien installée à Holguin», fait-il valoir.

Mariage, déménagement et froid

Célébré à Holguin à l’automne 2008, le mariage du couple Poulin-Silverio a été suivi de nombreuses péripéties.

Pendant près d’un an, Patrice Poulin a multiplié les allers-retours entre Magog et Cuba, afin de passer le plus de temps possible avec sa dulcinée.

Ana obtient finalement l’autorisation de s’amener au Québec en juin 2009, après avoir traversé le processus d’immigration. «Les autorités voulaient s’assurer qu’elle s’amenait au Canada pour les bonnes raisons. J’avais imprimé les 3000 courriels et je les ai déposés en preuve au bureau d’immigration pour démontrer que ce n’était pas un mariage arrangé. Son dossier a été accepté en un temps record», lance Patrice Poulin en riant.

Parlant couramment l’espagnol (langue maternelle) et l’anglais, Ana apprend à son tour le français et s’adapte à sa nouvelle vie québécoise. «Elle est même tombée en amour avec nos hivers. Mais, après cinq ans, elle a commencé à être un peu tannée du froid. C’est pour ça que depuis une couple d’années, elle retourne passer les mois de janvier et février à Cuba, afin de profiter de la chaleur», explique le frère de l’ancien maire de Magog, Marc Poulin.

«Probablement qu’à ma retraite, j’irai moi aussi passer quelques mois à Holguin. Outre le climat, je suis très attaché aux gens là-bas et j’y ai développé des amitiés sincères».

Arrivée d’Alejandro

Un autre important chapitre de vie s’est écrit pour Patrice et Ana, le 13 mai 2011, avec la naissance d’Alejandro.

Ironiquement, M. Poulin est aussi devenu grand-père pour la première fois durant la même période. «C’est une drôle de situation, puisque l’oncle est plus jeune que les nièces.

«Je sais que certains vont me trouver âgé pour être père, mais, au contraire, j’estime être mieux outillé avec mon expérience de vie. J’essaie de me garder en forme pour pouvoir suivre mon fils et être le plus présent possible. J’ai peut-être 57 ans, mais je ne crois pas qu’Alejandro en soit conscient. À ce moment de sa vie, que son père ait 57 ou 27 ans, ça ne fait pas vraiment de différence pour lui», estime-t-il.

Conscient qu’un amour doit être cultivé pour durer, Patrice Poulin jure n’avoir jamais tenu sa relation pour acquise. «Ana et moi sommes comme tous les couples, c’est-à-dire que nous avons nos moments difficiles et nos instants de bonheur. Nous misons beaucoup sur la communication pour traverser les épreuves.

«On pourrait écrire un livre tellement nous avons vécu d’aventures depuis notre première rencontre. Et je suis convaincu que ce n’est pas terminé, puisqu’on ne sait jamais ce que l’avenir nous réserve. Je peux toutefois vous affirmer que depuis quelques années, j’ai vraiment une vie extraordinaire», conclut-il.