Non à la location illégale

HÉBERGEMENT. L’offre de location à court terme (31 jours et moins) déborde dans une région touristique comme Memphrémagog. Chalet sur le bord de l’eau, chambre à prix modique, appartement et maison de campagne, tout y est. Le problème, selon des propriétaires de gîtes, c’est qu’un bon nombre de ces hébergements sont illégaux et les conséquences sur l’industrie sont préoccupantes.

Il suffit de naviguer sur Internet pour constater l’ampleur de ce phénomène, qui est répandu à travers le monde. Sur les sites traditionnels, on retrouve les joueurs légaux tels que les hôtels, motels, auberges et gîtes touristiques, mais en parallèle, il existe plusieurs plateformes de location entre particuliers, dont la plus populaire est Airbnb.ca.

Comme le dénonce l’Association des gîtes touristiques Magog-Orford (AGTMO, ce marché crée une compétition déloyale puisque les joueurs échappent à tout encadrement légal. Ce qui leur permet, bien souvent, d’offrir des prix fort alléchants pour les touristes. «Si on tient compte seulement de Magog et des environs, il y a trois à quatre fois plus d’offres illégales que légales sur le marché. C’est épouvantable le nombre de clients qu’on se fait voler, sans qu’on puisse ne rien faire», déplore le président de l’AGTMO, Richard Grenier du gîte Au coq du bonheur.

Ce marché noir fait très mal au portefeuille, surtout durant la saison morte, où le taux d’occupation est tout au plus de 20% comme au Manoir de la rue Merry, chez Benjamin Alexandre. «On fait tout pour être légal, mais c’est nous qui sommes pénalisés. Mon gîte, ce n’est pas un projet de retraite, c’est mon gagne-pain, mon emploi à temps plein. J’ai besoin de cet argent pour faire vivre ma famille, mais avec des frais fixes de plus de 5000 $ par mois, c’est difficile d’arriver lorsqu’autant d’illégaux profitent du système», déplore M. Alexandre.

Pour respecter la loi provinciale, tout hébergement doit obtenir une attestation de classification de Tourisme Québec qui elle, est conditionnelle à l’approbation de la Municipalité. Cette dernière doit s’assurer que le zonage respecte cette vocation commerciale. Mais dans les faits, ces règles sont bien souvent bafouées, aux dires de Pascal Bolduc du gîte Virage B&B. «J’ai dénoncé une trentaine d’hébergements illégaux depuis octobre dernier, principalement à Magog, mais malheureusement, aucune Municipalité n’a fait quelque chose. On a besoin d’aide et de l’appui de nos élus comme l’ont fait ceux de Québec et Montréal, sans quoi, certains propriétaires devront mettre la clé à la porte. C’est trop grave pour se fermer les yeux et ne rien signaler», avise-t-il.

Les trois hommes rappellent que les gîtes de Magog et Orford représentent plus de 10 000 nuitées par année, pour des retombées directes et indirectes de quelques millions de dollars.

Un potentiel à exploiter

Le préfet de la MRC de Memphrémagog et maire de Sainte-Catherine-de-Hatley, Jacques Demers, est bien au fait de cette problématique. En 2015, sa Municipalité a gagné en Cour supérieure contre un citoyen qui louait illégalement sa résidence, au grand dam de ses voisins qui se plaignaient du va-et-vient répétitif. Malgré des coûts de plus de 15 000 $ en trois ans dans ce dossier, M. Demers croit que c’était la chose à faire. «Je ne crois pas qu’on a les moyens de ne rien faire. Au-delà de l’aspect financier, comme Municipalité, on se doit de faire respecter notre réglementation. Sinon, qui va le faire?», se questionne-t-il.

Malgré ce gain, le premier magistrat demeure conscient que la bataille est loin d’être gagnée face à la location illégale. Selon lui, même avec un jugement entre les mains, une Ville ne peut même pas garantir son application. Il croit d’ailleurs que le problème est assez sérieux pour être pris en charge à la MRC. «Tous les maires devraient travailler ensemble pour envoyer un message clair que cette situation ne sera plus tolérée. Je crois quand même que s’il y a une telle demande, c’est qu’il y a un potentiel à exploiter, mais il doit être très encadré. La solution serait peut-être de définir des zones, dans chaque municipalité, où la location entre particuliers serait légale», soulève-t-il comme idée.

Jean-Pierre Adam – Maire du Canton d’Orford

«La difficulté pour une petite Municipalité comme la nôtre, c’est le manque de ressources et de moyens et avant d’aller devant les tribunaux, il faut avoir une preuve béton. C’est un peu le jeu du chat et de la souris.»

Vicki May Hamm – Mairesse de Magog

«Pour l’instant, la location illégale ne s’inscrit pas dans un plan d’action à la MRC, mais nous sommes sensibilisés à cette problématique. J’incite les citoyens à dénoncer de manière confidentielle toute situation non conforme puisqu’on ne procède pas sans plainte.»